Franck Riester déclare sa flamme au patrimoine : nous voulons des actes !

Vidéo de Franck Riester sur le patrimoine
partagée sur Twitter (capture d’écran)
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Le ministre de la Culture, Franck Riester, heureusement remis du Covid 19, a posté hier une vidéo sur Twitter à propos du patrimoine. Un discours où il affirme son amour et son intérêt pour le patrimoine, promettant des mesures à venir sans qu’une seule solution soit esquissée. Tout cela est bel et bon, surtout l’affirmation qu’il faudra « une fois la période de confinement passée [poser] la question essentielle de la relance de [ce] secteur d’activité. », mais comment croire à la sincérité de cet amour ? Il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour. Et ces preuves tardent un peu à venir.



En effet, comme nous l’avons déjà écrit, les aides au secteur de la culture, de seulement 22 [1] millions d’euros (quand l’Allemagne annonce 50 milliards d’euros...), ne concernent à aucun moment le patrimoine ni les propriétaires de monuments historiques ou les guides-conférenciers (pour ne prendre que deux exemples). Si les conservateurs-restaurateurs (voir notre article) pourront être éligibles aux arrêts de travail pour garde d’enfant, il n’y a rien de prévu au-delà de ce qui est mis en œuvre d’une manière générale pour les entreprises. Si ces mesures tout secteur (prêt garanti par l’État, report de paiements de certaines charges, financement de chômage partiel ou d’arrêts de travail…) vont plutôt dans le bon sens, il est inquiétant que celui du patrimoine ne soit pas davantage mis en avant par celui qui en est responsable, sinon par un discours un peu creux.

Pour « relancer ce secteur d’activité », un secteur déjà si mal en point avant la crise, ce ne sont pas des mots qui sont nécessaires, mais des actes. Sauver le patrimoine - et les entreprises qui en vivent - cela passe par deux mesures essentielles : la protection du patrimoine, une protection réelle alors que celle-ci n’a cessé depuis des années, et singulièrement sous la présidence d’Emmanuel Macron, de se réduire, et de vrais financement. Ces deux solutions sont faciles à mettre en œuvre. Plutôt que de faire de beaux discours, pourquoi le ministre de la Culture ne s’engage-t-il pas ? Parce qu’il faudrait, alors, s’opposer au président de la République qu’il passe son temps à flagorner ? Au moins entrerait-il dans l’Histoire comme un grand ministre, alors qu’il n’est pour l’instant qu’un nom de plus dans la grande litanie des ministres au mieux inutiles ?

Protéger le patrimoine : ce serait s’opposer, réellement, comme il en a le pouvoir, aux projets de démolition, à l’abandon, au vandalisme qui frappent de nombreux monuments historiques. Ce serait, pour ne prendre que quelques exemples actuels, imposer des travaux d’office aux château du duc d’Epernon, s’opposer à la découpe en appartements du château de Pontchartrain (voir aussi nos articles), abolir les niches fiscales qui autorisent cette découpe de monuments historiques, se battre pour revenir sur les dispositions de la loi Elan menaçantes pour le patrimoine (voir cet article) ou, plus concrètement, réagir par rapport à la démolition prévue mardi prochain (voir notre article) de plusieurs maisons médiévales à Alençon (il est vrai que cela signifierait s’opposer à un maire LREM, tâche quasiment insurmontable, on le sent bien, pour Franck Riester). Bref : faire appliquer la législation, et la renforcer. Toutes choses qui relèvent de la responsabilité du ministère.

Financer le patrimoine : ce serait, enfin, prendre en compte nos deux propositions (voir cet article), que nous martelons depuis plusieurs mois, d’une taxe de 1,8 % sur toutes les mises de la Française des Jeux, financée par une baisse légère (mais absolument pas dissuasive) de l’argent retourné aux gagnants ; augmenter de 50 centimes, voire d’un euro la taxe de séjour pour l’affecter aux restaurations des monuments historiques. Ces deux mesures, qui s’ajouteraient aux quelques 300 millions d’euros du budget du ministère pour le patrimoine, permettrait d’arriver quasiment à un milliard d’euros, sans même toucher au budget de l’État (qui pourrait pourtant être davantage mis à contribution, tant la part du patrimoine et des musées y est dérisoire).

Les grands discours, cela suffit. Ce que nous voulons désormais, ce sont des actes. La crise actuelle ne va pas diminuer la combativité des défenseurs du patrimoine, elle va la décupler.

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