Une fresque de Tiepolo entre au Louvre

25/11/20 - Acquisition - Paris, Musée du Louvre - Une fresque de Tiepolo a rejoint les collections du Louvre [1]. Œuvre monumentale de trois mètres de long, elle a été achetée auprès d’un collectionneur italien grâce à l’association des Amis du Louvre qui a soutenu cette acquisition à hauteur de 1,5 million d’euros. Elle représente Junon dans les nuées, reconnaissable au paon qu’elle tient dans les bras. Dans la partie inférieure, un putto porte ce qui semble être une lance, ou une hampe, sans doute une allusion à Junon victorieuse (Ivno victrix), tandis que le vase de pièces d’or renversé évoque Ivno Moneta, distributrice des richesses, iconographie que l’on retrouve dans le tableau de Véronèse : Junon versant des trésors sur la ville de Venise. Le motif de la roue est moins évident. Le peintre représenta la déesse avec un cortège plus fastueux dans une œuvre aujourd’hui conservée à Houston.


Giambattista Tiepolo (1696 - 1770)
Junon au milieu des nuées, vers 1735
Fresque transposée sur toile et montée sur bois - 350 x 210 cm.
Paris, Musée du Louvre
Photo : RMN-GP/H. Lewandowski
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La Junon que vient d’acquérir le Louvre décorait le palais Sagredo à Venise. Peinte à fresque, elle a été transposée sur toile, puis montée sur un parquetage de bois. Elle fut commandée par Gerardo Sagredo, procurateur de Saint-Marc, dignité la plus éminente de la République de Venise après celle du doge. On doit d’ailleurs à Tiepolo, le portrait d’un autre porcurateur, celui de Daniele IV Dolfin.

Le palais fut modifié au XVIIIe siècle. Gerardo, notamment, fit construire un grand escalier que Pietro Longhi orna en 1734 d’une vaste fresque illustrant de manière spectaculaire La Chute des Géants. Les autres pièces furent confiées à différents peintres, parmi lesquels Jacopo Amigoni, Nicolo Bambini, Girolamo Brusaferro ou encore Gasapre Diziani, sans oublier Gimabattista Tiepolo qui participa aussi au décor de la chapelle Sagredo dans l’église San Francesco della Vigna.

Le palais, depuis 2002, est devenu un hôtel de luxe. Si beaucoup de ses décors sont encore en place aujourd’hui, certains furent malheureusement démontés à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. Le Metropolitan Museum conserve ainsi tout un ensemble de stucs, et de bois sculptés qui ornaient l’une des chambres, ainsi que la peinture du plafond attribuée à Gaspare Diziani.

Junon à l’origine surgissait au plafond de l’un des appartements du troisième étage qui n’était pas celui du maître des lieux. Sur les murs de la pièce, le peintre peignit deux autres fresques, en grisaille, dont le thème ne semble pas correspondre à un programme iconographique très cohérent puisque l’une représente Moïse sauvé des eaux, et l’autre Apollon et Midas. Elles aussi furent démontées et transposées sur toile, elles se trouvent aujourd’hui à la Fondazione Magnani Rocca.
Les trois peintures sont signalées en France en 1910 dans la collection Clery par l’historien Eduard Sack dans sa monographie sur Giambattista et Giandomenico Tiepolo. Junon serait ensuite revenue en Italie en 1949 et aurait rejoint la collection du sénateur Mario Crespi à Milan.

Plusieurs fresques de Tiepolo connurent le même sort : le Metropolitan conserve ainsi tout un ensemble de figures allégoriques peintes en grisaille - en partie par son atelier - qui proviennent du Palazzo Valle-Marchesini-Sala à Vicence. Les époux André quant à eux, furent éblouis par la virtuosité du maître lorsqu’ils visitèrent la Villa Contarini et décidèrent d’acheter, de faire démonter, et d’envoyer à Paris la fresque illustrant L’Arrivée d’Henri III à la villa Contarini. On peut l’admirer aujourd’hui dans leur hôtel particulier devenu le Musée Jacquemart-André.

Junon fera l’objet d’une restauration prochainement. Elle rejoint dans les collections plusieurs peintures du maître, de plus petites dimensions, mais de grande qualité telles qu’Apollon et Daphné.

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