Inondations : irresponsables au plus haut niveau

Le Louvre et la Seine, 2 juin 2016 vers 19 h
Photo : Didier Rykner
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On sait ce que nous pensons (et ce que les conservateurs du Louvre et la grande majorité de la communauté scientifique pensent) de la décision de Jean-Luc Martinez de construire des réserves à Liévin, une aberration dont le Louvre paiera longtemps les conséquences. La situation actuelle ne nous fait pas changer d’avis, bien au contraire.

Signalons d’abord que le risque d’une inondation majeure à Paris du type de celle de 1910 est pour l’instant écartée par les spécialistes de ce domaine. Cela peut changer, bien entendu, et il convient de rester vigilant. La décision de fermer les musées demain et d’évacuer certaines œuvres menacées par une crue éventuelle relève du principe de précaution que l’on peut comprendre. Ce qu’il faut rappeler, cependant, c’est que les premières œuvres qui vont être ainsi mises en sécurité ne sont pas en réserves ! Ce sont celles du département des Arts de l’Islam, inauguré en zone inondable il y a seulement quatre ans, et celles de l’exposition Hubert Robert qui, fort heureusement, vient de se terminer.
De deux choses l’une donc : soit le Louvre a la possibilité d’évacuer toutes les œuvres avant l’arrivée de l’eau (très hypothétique à l’heure actuelle, répétons-le), et les réserves de Liévin sont inutiles, soit c’est impossible, et il faut prendre la décision de mettre en œuvre immédiatement, pas dans trois ans, le déplacement des réserves que l’on ne pourrait pas évacuer dans les délais dans un lieu temporaire, loué pour l’occasion et non loin de Paris. Nous n’écrivions pas autre chose en février dernier quand la perspective d’une crue était moins concrète qu’aujourd’hui.
La seule décision urgente que doit prendre le ministère et le président-directeur du Louvre est celle-ci, faute de quoi ils seraient comptables d’une potentielle catastrophe.
Une fois ces œuvres en sûreté, il ne serait donc plus nécessaire d’agir dans la précipitation comme on l’a toujours fait sur ce sujet, mais on pourrait se poser vraiment la question de l’emplacement des réserves extérieures, de ce que l’on peut et de ce que l’on doit garder ou non sur place, de l’éventualité de créer plusieurs réserves différentes, pas forcément au même endroit, pour les différents départements, et de l’opportunité d’aménager des espaces en hauteur dans le Louvre même (par exemple dans certains des dômes), ou d’utiliser des bâtiments existants à proximité comme l’ancien Musée des Arts et Traditions Populaires.

On voit déjà quelle utilisation le ministère et le Louvre vont faire de la situation actuelle (c’est déjà le cas en filigrane dans le communiqué publié aujourd’hui par le musée) : s’en servir pour renforcer encore le projet de Liévin, alors qu’il s’agit surtout d’une démonstration de leur impuissance à trouver une solution à la hauteur des enjeux.

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