Urbanisme : Saint-Tropez, ville martyre ?

Comme nous le faisons désormais de plus en plus souvent, cet article est complété par un film (visible en bas de page). Les images que nous avons tournées témoignent encore mieux qu’un texte et quelques photos du sort aujourd’hui réservé à Saint-Tropez.

1. Travaux en cours (29/5/13) à deux pas de la
place des Lices. L’opération s’appelle
d’ailleurs « Résidence des Lices »
Photo : Didier Rykner
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La révision du Plan Local d’Urbanisme (PLU) est un outil efficace pour certains maires désireux de construire dans leur ville à peu près ce qu’ils y veulent.
A Saint-Tropez, le PLU vient d’être voté par le conseil municipal, et il constitue un exemple presque caricatural de ce qu’il ne faudrait pas faire. On se demande d’ailleurs à quoi sert un tel document d’urbanisme, aussi permissif soit-il, alors que les règles actuellement en vigueur sont bafouées aussi régulièrement. Les enjeux financiers sont tellement énormes qu’il est bien difficile pour certains de résister. La ville – ou plutôt le village – est ainsi livré à l’appétit de promoteurs qui défigurent gravement un environnement pourtant encore relativement préservé.
Les exemples d’atteinte à l’intégrité architecturale de Saint-Tropez sont tellement nombreux qu’on ne sait réellement par où commencer et qu’on sera ici fort loin de l’exhaustivité. Un livre n’y suffirait pas. Il faut donc être conscient que tout ce dont nous allons parler n’est qu’une partie émergée de l’iceberg. Les irrégularités sont innombrables, le laisser-faire est davantage la règle que l’exception et ce que contient le PLU promet encore pire. Nous aurions pu multiplier les exemples ad nauseam et ce terme est ici particulièrement bien employé.

Nous avons rencontré des membres des associations locales qui se battent, très seuls, contre cette politique. Nous avons, comme il se doit, demandé à être reçu par un responsable de la mairie lors de notre séjour sur place en précisant que notre article porterait notamment sur le PLU et l’urbanisme. Nous n’avons reçu de réponse que le jour de notre arrivée sur place, et celle-ci fut négative : « M. le maire […] communiquera sur le sujet du PLU une fois que celui-ci sera approuvé ». Nous avons, la semaine dernière, interrogé à nouveau le maire sur les nombreuses irrégularités que nous avons constatées et que nous rapportons ici. On nous a répondu qu’ : « après étude de [n]os emails […] le cabinet de M. le maire ne donnera pas suite à [n]otre demande ». On peut le comprendre, tant sa politique est indéfendable. Nous avons aussi demandé des explications au Directeur régional des affaires culturelles et à l’architecte des bâtiments de France. Sans résultat. Et nous n’avons pas davantage eu de succès en nous tournant vers le préfet du Var. Sans doute nos questions sont-elles trop dérangeantes...

Un maire « bâtisseur »

2. Bâtiment en cours de construction
« Résidence les Lices » (29/5/13)
Face à la chapelle de Saint-Tropez
Photo : Didier Rykner
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Alors qu’il était encore dans l’opposition, Jean-Pierre Tuvéri jouait au chevalier blanc. Le 7 juin 2005, il déclarait ainsi, dans Var-Matin, à propos des terrains de l’ancien hôpital, être « foncièrement hostile à toute opération immobilière ». Il précisait même : « Ces terrains, récemment acquis par la ville à un prix raisonnable doivent être intégralement réservés à la construction de logements locatifs, destinés aux Tropéziens, y compris les actifs travaillant dans la cité […] Il ne saurait être question qu’une partie en soit revendue à des promoteurs privés […]. » Il est donc pour le moins surprenant que ce soit lui qui mène justement l’opération dont il dénonçait le risque. Sans doute les promoteurs de chez Kaufman et Broad ont-ils eu des arguments très convaincants. Il est dommage que Jean-Pierre Tuvéri ait refusé de nous expliquer les raisons d’une volte-face aussi remarquable.
Alors qu’il s’était présenté avec une image de protecteur du patrimoine, le maire mène une politique absolument inverse. Il y a là quelque peu tromperie sur la marchandise. Voilà ce que le maire de Saint-Tropez est en train de faire construire « au cœur du village [...] à quelques mètres de la Place des Lices, du Vieux Port et non loin des plages », comme le dit la publicité de Kaufman et Broad (ill. 1 et 2).

L’artifice est désormais bien rodé : pour faire passer une belle opération immobilière, bien profitable, il suffit de promettre une petite partie de social. L’opération, globalement, reste très rentable et peut ainsi passer plus facilement auprès du public et des autorités de tutelle. Quels monstres d’égoïsme pourraient s’opposer à la création de crèches, de logements sociaux ou de résidences pour personnes âgées ?

Ainsi, les deux gigantesques programmes immobiliers en cours, à deux pas chacun de la vieille ville et de la place des Lices, qui forme le cœur de la cité, réserveront une partie de leurs appartements aux gens de la ville. Quelle partie ? Les opposants dénoncent une opération totalement opaque qui ne bénéficierait pas forcément à ceux en ayant le plus besoin, tandis que le reste serait vendu à un prix très élevé par Kaufmann et Broad…
Il faut dire que la population locale a de plus en plus de mal à se loger : les maisons qui il y a cinquante ans ne valaient pas grand-chose se vendent souvent aujourd’hui plusieurs millions d’euros. Les habitants qui en héritent ne peuvent faire face aux charges de succession et doivent se résigner à s’en séparer. Les terrains sont, dans certains cas, acquis par la municipalité qui les revend aux promoteurs. Parfois, ces derniers achètent directement, avec la bénédiction du maire. La modification du PLU, qui rend constructibles des zones qui ne l’étaient pas et qui augmentera drastiquement le coefficient d’occupation des sols et la hauteur autorisée, notamment sur la première couronne autour de la vieille ville, va rendre d’autant plus intéressant ce type d’opérations. Une fois la zone densifiée, au détriment de l’aspect historique de la ville, les maisons à proximité sont dévalorisées et la promotion devient encore moins chère. Un cercle vicieux est lancé.

Ceci est d’autant plus grave à Saint-Tropez que cette petite ville historique aurait dû, depuis longtemps, bénéficier de la protection d’une ZPPAUP. L’un des anciens maires, Alain Spada, que nous avons rencontré, avait préparé un tel projet qui devait être approuvé en 1993, juste avant qu’une élection municipale anticipée, ne porte une autre équipe à la tête de la ville. Jean-Michel Couve, le maire ayant succédé à Alain Spada, qui nous a contacté après la parution de cet article, nous a dit avoir souhaité mettre en place une ZPPAUP qui couvrait davantage que la vieille ville. Il est regrettable qu’aucune ZPPAUP n’ait finalement été mise en place [1]...
Sans ZPPAUP, la protection est minimale. Voici un petit aperçu des irrégularités que nous avons pu constater dans Saint-Tropez, que ce soit dans la ville même ou dans la campagne environnante.

Prenons ainsi l’exemple d’une construction en cours dans le quartier de Valfère (ill. 3). La maison, manifestement dessinée par un bon architecte, n’est pas laide en elle-même. Mais elle détonne totalement dans le paysage et n’a rien à faire ici, d’autant qu’elle est visible par tous. Surtout, notre goût personnel n’a rien à faire ici : cette construction est hors la loi tant du point de vue de l’ancien POS, en vigueur lorsque sa construction a commencé, que de celui du nouveau PLU. Ainsi, le POS et le PLU exigent explicitement pour la zone où elle s’élève que la couverture de toute construction comporte au moins une pente comprise entre 25 et 30% de déclivité ; les deux règlements imposent des caractéristiques pour les tuiles qu’on serait bien en peine de trouver pour cette maison qui a un toit plat ; les couleurs doivent être conformes à celles de la palette déposée à la mairie, le blanc n’en faisant pas partie et étant même interdit explicitement par le nouveau PLU [2] (le POS indiquait d’ailleurs que les enduits doivent reproduire la couleur des enduits anciens)... Le maire de Saint-Tropez ne peut feindre d’ignorer ces irrégularités : l’édifice se trouve quasiment sous ses fenêtres.
Non loin de là, une autre maison se construit, et l’on voit à la profondeur des fondations qu’il y aura plusieurs niveaux de sous-sol. Ceci était totalement interdit avant le nouveau PLU qui, désormais, l’autorisera.


3. Maison en cours de construction dans le quartier de Valfère
Totalement en contradiction avec les règles d’urbanisme
Photo : Didier Rykner
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4. Centre d’action sociale en construction en contradiction
avec les souhaits des vendeurs, enregistrés par acte notarié.
La construction s’élève sur le jardin d’une maison donnant
sur la place des Lices (29/5/13)
Photo : Didier Rykner
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Une autre irrégularité (il s’agit d’un euphémisme) est la construction d’un Centre communal d’action sociale (CCAS) sur le jardin d’une maison donnant sur la place des Lices (ill. 4). Cet ensemble avait été vendu par ses propriétaires en viager à la mairie, pour une somme raisonnable, sous la condition essentielle, constatée par un acte notarié, que l’immeuble (ce qui inclut à la fois la maison et le jardin) soit « destiné aux personnes âgées de la Commune de Saint-Tropez ». Cette construction est donc contraire au contrat signé, sans compter qu’elle ampute un jardin du centre-ville.

Bernard Tapie et son héliport

5. L’héliport construit par Bernard Tapie sur sa propriété
en contradiction totale avec le règlement d’urbanisme qui
interdit tout déboisement et toute construction
Avant qu’il ne recouvre le tout de terre
Photo : D. R.
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Parmi les nouveaux habitants de Saint-Tropez, l’un des plus célèbres n’est autre que Bernard Tapie. La presse s’est récemment fait l’écho [3] de la construction d’une piste d’hélicoptère dans sa propriété qui se trouve sur la colline des Moulins. Il a ainsi, en toute illégalité, sans autorisation qu’il n’aurait de toute façon pas obtenue, coupé de très nombreux pins et bétonné le sol sur une grande surface (ill. 5), alors qu’on se trouve dans une zone totalement inconstructible. Il a prétendu dans Le Figaro [4] qu’« il n’y a pas de piste d’atterrissage d’hélicoptère dans son jardin » et son architecte ajoutait qu’il s’agissait seulement « d’aménager un parking sur une surface de 500 m2 ». D’une part, cela ne change strictement rien à l’affaire, d’autre part, il s’agit d’une contre-vérité : il s’agit bien d’une piste d’hélicoptère.
Croyant s’en tirer à bon compte, et devant le tollé soulevé par cette révélation, Bernard Tapie fait dire à son architecte que « les engins de chantier sont en train de tout remettre en état, [que] des arbres vont être replantés et [que] tout va rentrer dans l’ordre ». Les photos (et le film) que nous avons pu prendre prouvent seulement qu’il a fait déposer sur la piste quelques dizaines de centimètres de terre (ill. 6) et qu’il s’apprêtait, lorsque nous nous y sommes rendu (fin mai 2013), à y planter des lauriers roses, quelques petits palmiers et des plantes en pot (ill. 7) à la place des pins parasol qui s’y trouvaient. C’est ce que Bernard Tapie appelle « remettre en état [5] ». Le maire est alerté, le préfet est alerté. Qu’attendent-ils pour constater les ravages faits à cette colline boisée et inconstructible, et pour prendre les sanctions qui s’imposent ?


6. Vue de la propriété de Bernard Tapie : l’héliport a été
recouvert de terre (29/5/13)
Photo : Didier Rykner
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7. Les plantes en pots que Bernard Tapie prévoyait de
replanter à la place des pins parasol qu’il a fait couper...
Photo (prise le 29/5/13) : Didier Rykner
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Bernard Tapie affirmait encore via Le Figaro que le 1er juin serait « journée portes ouvertes », afin de « démontrer que tout aura été remis en état ». Des habitants se sont présentés à plusieurs reprises dans la journée et ont, bien sûr, trouvé portes closes. L’homme d’affaire aurait en effet du mal à remettre en état ce terrain comme le prouve le film que nous avons pu tourner.

La vieille ville n’est pas épargnée

8. Vue sur une « terrasse tropézienne » construite
de manière illégale. Encore celle-ci est-elle petite. D’autres
sont beaucoup plus grandes.
Photo : D. R.
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Les scandales se multiplient également au cœur même de la vieille ville. Alors que la création de « terrasses tropéziennes » (ill. 8), créées au milieu des toits en tuile, est strictement interdite, celles-ci se multiplient plus ou moins discrètement et toujours illégalement.
Autre exemple, qui se déploie en pleine rue, au vu et au su de tout le monde, sans que le maire croit nécessaire de s’y opposer : la façade d’une maison occupée par un bar, s’est vue affublée de bancs scellés dans le mur, qui se replient lorsqu’ils ne sont pas utilisés (ill. 9) . Ceci est illégal (« l’ensemble des installations doit être rangé à l’intérieur du commerce en dehors des heures d’ouverture »), extrêmement laid et en plus dangereux, les bancs dépassant à une hauteur pouvant blesser un enfant qui courrait dans la rue. Que fait le maire ? Rien, évidemment.


9. Bancs-strapontins installés en toute illégalité
sur la façade d’un bar dans la vieille ville.
À la fois inélégants et dangereux.
Photo : Didier Rykner (29/5/13)
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Même lorsqu’il prétend restaurer un monument historique, Jean-Pierre Tuvari n’est pas mieux inspiré : ainsi, la tour Jarlier, à l’angle de la rue d’Aumale et de la rue de la Citadelle, qui date du XVIe siècle et est inscrite aux monuments historiques, est en cours de « restauration ». Mais peut-on appeler ainsi une opération consistant à noyer les pierres apparentes dans un crépi grisâtre ? L’affaire fait parler à Saint-Tropez, mais le maire évidemment n’en a cure. On comparera l’état avant-après pour comprendre le problème (ill. 10 et 11). Voilà un effet de la récente loi sur la maîtrise d’ouvrage sur les monuments historiques qui donne celle-ci aux municipalités. C’est elle qui a fait le choix de l’enduit. Il est étonnant que la DRAC puisse fermer ainsi les yeux.


11. La tour Jarlier de Saint-Tropez
avant sa « restauration » par la mairie.
Photo : Martinp1 / Licence Creative
Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported
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12. La tour Jarlier de Saint-Tropez en cours de « restauration »
Photo : Didier Rykner (29/5/13)
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Un peu plus loin, au pied de la citadelle classée monument historique, le maire, qui voit grand, fait construire une billetterie d’une taille totalement disproportionnée. On peut voir sur les images, et sur notre film, combien cette construction (même semi-enterrée comme elle est prévue) risque de nuire aux abords du monument. Comment l’Architecte des Bâtiments de France a-t-il pu autoriser cela ? Une fois de plus, on se demande à quoi sert la législation des monuments historiques…


12. Chapelle du couvent Saint-Tropez hors les murs
Inscrite aux monuments historiques
À droite bâtiments de la coopérative qui, dans le PLU, peuvent
être remplacés par des bâtiments de 5 étages (plus rez-de-chaussée)
Ces bâtiments se trouvent face à la « Résidence des Lices »
Photo : Didier Rykner
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Un autre monument historique, la chapelle Saint-Tropez, dite aussi chapelle du couvent Saint-Tropez hors les murs (ill. 12), qui est pourtant en cours de restauration, sera bientôt bordée d’habitations hautes de cinq étages : c’est en effet ce que prévoit désormais le PLU. La chapelle se trouve à proximité de la place des Lices, et encore plus près de l’opération immobilière qui y est en cours, où la hauteur des bâtiments n’est au maximum « que » de trois à quatre étages.

Quant aux terrains de l’ancien hôpital (non protégé), livrés à la promotion immobilière, si l’ABF a pu empêcher in extremis la destruction complète de l’hôpital, un bel édifice datant des années 1900 (ill. 13) les intérieurs ont cependant été complètements démolis : l’escalier monumental a ainsi disparu. Seules les façades et les toitures devaient être conservées mais on parle désormais de le surélever. Inutile de dire que cela condamnerait définitivement un bâtiment déjà bien mis à mal par la construction à proximité immédiate d’immeubles d’habitation dont la taille et la banalité architecturale n’a rien à faire dans un village tel que Saint-Tropez (ill. 14).


13. Ancien hôpital de Saint-Tropez
État du 29/5/13
Photo : Didier Rykner
.
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14. Projet immobilier Kaufman et Broad sur les terrains
de l’hôpital de Saint-Tropez
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Des chemins transformés en route

15. L’un des nombreux chemins du village dont le PLU
autorise un agrandissement jusqu’à 10 m de largeur
Photo : Didier Rykner
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Saint-Tropez souffre déjà de la circulation. Quiconque a voulu se rendre dans ce village en voiture sait que la route qui longe le littoral est perpétuellement victime de bouchons. Pour circuler à l’intérieur de la commune, en revanche, un grand nombre de petites routes, qui ressemblent davantage à des chemins (ill. 15), sillonnent la commune, dont beaucoup ne sont connues et utilisées que par les habitants. Ces chemins longent certaines propriétés ou zones classées ou inscrites telles que La Hune, la maison de Paul Signac, classée monument historique. Mais le maire de Saint-Tropez semble décidément ne pas trop aimer les monuments historiques. La route qui longe La Hune pourra ainsi être élargie jusqu’à dix mètres, amputant largement le domaine resté intact jusqu’à aujourd’hui. Cet élargissement général des routes, outre l’atteinte importante au patrimoine qu’il provoquera, aboutira à un afflux supplémentaire de véhicules dans le village de Saint-Tropez, alors que c’est l’inverse qu’il faudrait faire.

16. Emplacement des chantiers navals sur le port
de Saint-Tropez. A droite, le parking. L’ensemble
est promis à la promotion immobilière par le PLU
Photo : Didier Rykner
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Le maire a un autre projet que l’on pourrait trouver excellent : supprimer le parking qui se trouve sur le port (à droite lorsque l’on vient de la mer). Mais à la place du parking, le long du port, que verra-t-on ? Une opération de promotion immobilière, bien sûr. Le port, déjà défiguré (mais de manière réversible) par les yachts dont la taille cache la ville lorsqu’on la regarde depuis la mer, et la mer lorsqu’on la regarde depuis les quais, sera ainsi définitivement enlaidi par ces nouveaux immeubles dont on peut imaginer qu’ils ressembleront à ce qui se construit déjà aujourd’hui. Ceux-ci se substitueront également aux actuels hangars abritant toujours des constructions navales (ill. 16). Ces hangars sont, il est vrai, assez peu esthétiques, mais ils ont une hauteur réduite et sont assez discrets ; et une telle activité a sa place légitime sur un port.

Faut-il se résigner à la mort de Saint-Tropez ?

Nous avons déjà évoqué la destruction d’une partie d’une colline classée par Bernard Tapie. Mais les démolitions et constructions illégales sur ces zones qui surplombent le littoral, ou sur le littoral lui-même, sont également innombrables. Yves Thorailler, président de l’association Pouvoir Vivre à Saint-Tropez, nous en a montré plusieurs et toute énumération serait fastidieuse. À chaque fois, la mairie, l’ABF, le préfet ont été prévenus par les associations mais les poursuites sont très rares. Pourquoi se gêneraient-ils ?

Saint-Tropez apparaît ainsi livré à un vandalisme effréné. Alors que le charme de ce village réside, justement, dans son état de conservation et dans le pittoresque de son urbanisme, demain, ce charme n’existera plus.
Pourquoi le maire laisse-t-il faire ? Il ne daigne même pas, comme pour nous, répondre aux nombreux courriers que lui envoient les associations. Que l’État soit aussi absent est encore plus problématique et scandaleux. Une fois de plus, on peut s’interroger : la France est-elle encore un État de droit ? Saint-Tropez, livré à l’appétit des promoteurs, est en train de disparaître. Le PLU qui vient d’être voté va encore aggraver la situation. Trois choses peuvent encore sauver ce village :

 Un réveil du gouvernement et du préfet qui agiraient enfin pour faire strictement appliquer la loi ; très franchement, nous n’y croyons pas.

 Des actions des associations : celles-ci semblent désarmées devant l’accumulation de scandales et il faudrait qu’une association nationale - elles sont déjà très sollicitées - prenne les choses en main. La ministre écologique Cécile Duflot vient d’ailleurs de rendre les actions judiciaires encore plus difficiles et risquées ; nous l’invitons à se rendre à Saint-Tropez pour nous dire où sont les recours « abusifs » ! Ce qui est abusif, c’est l’urbanisme sauvage qui défigure la ville.

 Les prochaines élections municipales qui, il faut l’espérer, verront les tropéziens renvoyer le maire à ses études ; ils ont entre leurs mains la possibilité de sauver leur ville. Vont-ils la laisser détruire ?


Urbanisme : Saint-Tropez, ville martyre ? par latribunedelart

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