L’inquiétante opacité du chantier de l’Hôtel Lambert

L’Hôtel Lambert en travaux
Septembre 2011
Photo : Didier Rykner
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8/9/11 - Patrimoine - Paris, Hôtel Lambert - En janvier 2009, lorsque avec quelques confrères nous avions pu visiter l’Hôtel Lambert, le maître d’ouvrage, c’est-à-dire le propriétaire, frère de l’Emir du Qatar, nous avait fait savoir par son avocat Me Ginter que le chantier serait entièrement ouvert aux journalistes, preuve de la transparence avec laquelle il semblait vouloir mener une opération alors très discutée.

En dépit des nombreuses inquiétudes qui s’étaient élevées au sujet de cette restauration, un compromis acceptable par tous avait été trouvé (voir la brève du 22/1/10) et les travaux avaient finalement pu commencer il y a plusieurs mois. A ce propos, on se réjouira que, contrairement aux administrations publiques qui défigurent les quais de la Seine avec des publicités géantes, ce chantier soit vierge de toute pollution visuelle.
Il y a lieu, toutefois, d’être très inquiet. Malgré nos nombreuses demandes de visite, l’autorisation nous a systématiquement été refusée, le propriétaire refusant de donner l’accès aux journalistes, contrairement à ce qui avait été annoncé. La volonté manifeste de dissimuler à la presse l’avancement du projet n’augure rien de bon. Alain-Charles Perrot, qui a pris sa retraite de sa fonction d’architecte en chef des monuments historiques, mais qui reste en charge de ce chantier, nous affirme regretter de ne pas pouvoir nous le faire visiter, protestant de sa volonté d’ouverture. Nous ne sommes pas pour autant rassuré par cette censure.

Le cahier des charges est-il respecté ? Les recommandations du comité scientifique sont-elles suivies ? Nous avons, sur ces questions, des sources différentes qui se contredisent d’ailleurs un peu. D’un côté, on regrette que les interventions soient trop importantes et que notamment beaucoup de pierres soient changées, de l’autre on nous rassure plutôt en nous affirmant que l’accord serait apparemment respecté à la lettre. Devant l’impossibilité de vérifier par nous même, nous en sommes réduit à des conjectures.
Ce qui est certain en revanche, c’est que quelles que soient les découvertes effectuées sur ce chantier, le propriétaire s’est désormais retranché dans un position systématique de refus. Ainsi, dans l’aile gauche, sous un plafond plus récent, des poutres peintes du XVIIe siècle ont été retrouvées, en bon état. Malgré la demande officielle du ministre de la Culture d’aménager quelque peu le projet afin de dégager ce décor, une fin de non recevoir a été opposée. Il sera donc recouvert. Cela en dit long sur la réalité de l’amour du XVIIe siècle du propriétaire que nous vantait les représentants du ministère. Il est vrai que, depuis, le fils du frère de l’Emir, qui était semble-t-il le véritable amateur et qui était en charge de suivre les travaux, a été évincé par son père.

D’ici un mois environ, les travaux de la façade sur jardin seront terminés et l’échafaudage sera enlevé. En attendant, nous réaffirmons publiquement notre demande que la promesse du propriétaire soit tenue, à savoir que la presse puisse avoir accès régulièrement au chantier. Compte tenu de la polémique qui a terni le début de celui-ci, on ne comprendrait pas la persistance d’un refus qu’on ne pourrait interpréter que comme une volonté de cacher quelque chose.

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