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Un soir chez la princesse Mathilde. Une Bonaparte et les Arts

Ajaccio, Palais Fesch, Musée des Beaux-Arts, du 27 juin au 30 septembre 2019

1. Bezzuoli Giuseppe (1784-1855)
Portrait de la princesse Mathilde, vers 1840
Huile sur toile - 79 x 58 cm
Ajaccio, Palais Fesch
Photo : RMN-GP / Gérard Blot
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Delacroix était un « saligaud [1] ». Avec un verbe fleuri et une « franchise un peu fruste, presque masculine  [2] », la princesse Mathilde savait affirmer ses préférences (ill. 1) . En art elle aimait la légèreté et la simplicité [3], elle passa à côté de grands maîtres de son temps, dédaignant Courbet « c’est en dessous de tout », Manet « c’est immonde  [4] », les impressionnistes « c’est raté ». Et pourtant. Dans son brillant salon, le monde de l’art - critiques, artistes, conservateurs - se pressait le vendredi, celui de la littérature le mercredi, incarné tout de même par Théophile Gautier, Sainte-Beuve, Flaubert, les frères Goncourt… Ce salon attira les peintres et les écrivains, il les inspira aussi. Proust en fit une description savoureuse dans Le Figaro en 1903 [5] et Giuseppe De Nittis, introduit par Goncourt, sut saisir en 1883 le froissement élégant des robes et le bouillonnement mondain des conversations ( ill. 2). Quant à Albert Besnard, il portraitura l’hôtesse en toilette du soir ; il n’avait pas encore le succès qu’on lui connut, mais la princesse soutenait les nouveaux talents. Sa peinture, malheureusement, déplut à son modèle.

2. Giusepppe De Nittis (1846-1884)
Le Salon de la princesse Mathilde, 1883
Huile sur toile - 91 x 73 cm
Barletta, Pinacoteca Comunale Giuseppe De Nittis
Photo : bbsg
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À travers ces trois visions écrites et peintes des réceptions de son altesse impériale, le visiteur est inclus parmi les invités dès la première salle, accueilli « avec un sans façon qui était l’extrême raffinement de la condescendance et de la politesse [6] ». En réalité, l’exposition commence à l’envers. Car Proust comme De Nittis et Besnard décrivent l’hôtel de la rue de Berri, celui que Mathilde occupa après la chute de l’Empire en 1870, plus modeste que celui de la rue de Courcelles dont les aménagements somptueux sont dépeints plus loin par Giraud. Le visiteur est reçu par une princesse âgée, sculptée par Denys Puech. Quelques irréductibles fidèles qui fréquentaient déjà la rue de Courcelles sont encore là, mais la roue a tourné. Viollet-le-Duc et Cabanel se sont brouillés avec Mathilde ; Sainte-Beuve et Hyppolite Taine aussi, l’un ayant eu le mauvais goût de se rapprocher des ennemis de l’Empire en collaborant avec Le Temps, l’autre, ce « cochon [7] », ayant dressé un portrait critique de Napoléon. Car Mathilde Bonaparte savait faire preuve d’une certaine ouverture d’esprit et laissait s’exprimer chez elle les Républicains, à la condition qu’on ne remît pas en cause la grandeur de l’empereur, et même des deux, son oncle et son cousin.

Fille de Jérôme Bonaparte et de Catherine de Wurtemberg, nièce de Napoléon Ier et du tsar de Russie, elle naquit en 1820 à Trieste et fut élevée…

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