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Turner : les dernières années, la peinture libérée
« Late Turner : painting set free »
Londres, Tate Britain, du 10 septembre 2014 au 25 janvier 2015
Los Angeles, J. P. Getty Museum, du 25 février au 24 mai 2015
San Francisco, Young Fine Arts Museum, du 20 juin au 20 septembre 2015.
Non, Turner n’a pas fini gâteux. L’exposition que la Tate Britain consacre à ses dernières années ne révèle en cela rien d’extraordinaire. Réunissant des œuvres réalisées entre 1835 - année de ses soixante ans - et 1850 - année de sa dernière exposition - elle a pourtant le mérite de nuancer l’image du maître, qu’on aimerait voir comme un artiste incompris et retiré du monde, comme un génie précurseur de tout et en particulier de l’abstraction.
- 1. Joseph Mallord William Turner (1775–1851)
L’Ange debout dans le soleil, 1846
Huile sur toile - 78,7 x 78,7 cm
Londres, Tate Britain
Photo : Tate Britain - Voir l´image dans sa page
- 2. Joseph Mallord William Turner (1775–1851)
Paix - enterrement en mer, 1842
Huile sur toile - 87 x 86,7 cm
Londres, Tate Britain
Photo : Tate Britain - Voir l´image dans sa page
Mais William Turner était un peintre de son temps qui, malgré le poids des ans, s’intéressa aux évolutions industrielles et sociales de la nouvelle ère victorienne, et qui, malgré les succès de sa carrière, se préoccupa des mutations du marché, du renouvellement de sa clientèle et des expositions de la Royal Academy. Sans cesse et sans rupture, il renouvela sa art, produisant dans les dernières années de sa vie certaines de ses œuvres les plus emblématiques, comme en témoignent les « square canvas », ces toiles carrées aux compositions circulaires (ill. 1 et 2), exceptionnellement réunies au centre du parcours de la Tate Britain. Exposées deux par deux entre 1841 et 1846, elles s’organisent autour d’un point de lumière et deviennent peu à peu des tourbillons éblouissants, vortex de couleurs lumineuses, qui traduisent aussi bien le Déluge que l’exil de Napoléon, un enterrement en mer ou l’apparition de l’archange à l’heure du jugement. Celui des critiques fut sans appel, déroutés par l’audace d’exécution, le format inhabituel, l’aspect inachevé de ces peintures ; même Ruskin qui considérait Turner comme l’un des plus grands…