La Cour des comptes enquête sur la vente des meubles de Grignon

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1. Château de Grignon
Photo : Laurent Bourcier (CC BY-SA 3.0)
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24/2/23 - Patrimoine - Château de Grignon - Une ordonnance relative au régime de responsabilité financière des gestionnaires publics a récemment modifié les conditions dans lesquelles les gestionnaires publics peuvent être sanctionnés pour leurs actions. Les « ordonnateurs », c’est-à-dire les responsables des décisions, sont désormais (depuis le 1er janvier 2023) passibles de sanctions pécuniaires « pouvant aller jusqu’à six mois de rémunération ». Comme l’a dit le Premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici : « L’Article 15 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen – “La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration” – voit ainsi sa portée pleinement adaptée aux enjeux du XXIe siècle. »

La saisie par le Procureur général près la Cour des comptes de celle-ci pour l’ouverture d’une instruction contentieuse sur l’affaire de la vente du mobilier du château de Grignon (ill. 1), annoncée il y a deux jours sur le site de l’institution est donc une première, et nous en sommes d’autant plus heureux que cette décision est fondée sur des « informations publiées dans différents organes de presse ». Ces organes de presse, les premiers qui ont alerté sur ce scandale, sont le même jour Le Canard Enchaîné et La Tribune de l’Art. Nous avions en effet publié une enquête très détaillée.


2. Jacques Bircklé, maître en 1764
Secrétaire provenant du château de Grignon actuellement en vente
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3. Le secrétaire de Jacques Bircklé présenté par le site des Domaines lors de la vente comme « de style, fin XIXe »
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L’instruction va donc désormais avoir lieu, menée par la Cour des comptes, qui « déterminera de quelle manière l’opération a été menée, si des règles ont été enfreintes et, le cas échéant, définira les responsabilités ». Notons que nous avions signalé ici même la vente d’un autre meuble provenant de Grignon, mais que rien n’a été fait par l’État pour le récupérer ou le racheter. L’antiquaire était de toute bonne foi, car il l’avait acheté à celui qui l’avait acquis de manière apparemment régulière lors de la vente contestée des Domaines. Il nous avait même rappelé pour dire qu’il allait le vendre de nouveau, s’inquiétant de ce qu’il devait faire. Devant l’inaction complète de l’État, il se sentait légitimement en droit de le revendre, et nous n’avions malheureusement aucun argument supplémentaire pour l’en dissuader. D’ailleurs, depuis, et c’était prévisible, d’autres meubles réapparaissent, et un de nos lecteurs nous a par exemple signalé ce secrétaire (ill. 2), en vente sur Internet, qui provient de Grignon (ill. 3) et qui avait été cédé comme « de style, fin XIXe ». Estimé 30 €, il avait été finalement adjugé 1000 €. Il portait en réalité une estampille de Jacques Bircklé, reçu maître en 1764.

Il faut espérer que cette triste affaire établira les responsabilités des donneurs d’ordre, mais aussi de ceux qui n’ont pas rempli leur mission de contrôle, et incitera à l’avenir les fonctionnaires responsables d’institutions publiques à s’intéresser davantage au patrimoine national.

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