Églises parisiennes : le ministère doit imposer des travaux d’office !

3 3 commentaires

Dans un communiqué de presse envoyé le 19 décembre dernier, Bruno Julliard, premier adjoint à la mairie de Paris et adjoint à la Culture, « salue la place centrale accordée [...] à la préservation du patrimoine dans le Programme d’investissement de la Mandature [1] ». Le communiqué précise que la préservation du patrimoine sera au cœur des priorités de la « mandature » et annonce, comme si c’était une information nouvelle et, surtout, remarquable, le chiffre de 80 millions d’euros « investis d’ici 2020 pour la rénovation des édifices cultuels parisiens » [2].


1. François-Édouard Picot
Peinture murale du cul-de-four
État actuel
Paris, église Saint-Vincent-de-Paul
Photo : Didier Rykner
Voir l´image dans sa page
2. Filets sur la façade de l’église Saint-Vincent-de-Paul
Photo : Didier Rykner
Voir l´image dans sa page

Il s’agit exactement, ni plus ni moins, du montant annoncé pendant la campagne électorale d’Anne Hidalgo. Sur ce chiffre, au moins, elle n’a pas menti. En revanche, prétendre qu’il s’agit d’une priorité ou d’un « plan d’investissement d’une ampleur inédite », c’est prendre les Parisiens pour des imbéciles : comme nous l’avons déjà écrit, si ce montant est légèrement supérieur à celui de la dernière mandature de Bertrand Delanoë, il est un peu inférieur à celui de la première. Cela revient en réalité à consacrer en moyenne le même budget annuel à la restauration des églises parisiennes que du temps de Bertrand Delanoë, ce qui a abouti à la désastreuse situation actuelle.
On sait qu’il faudrait, selon les associations, 500 millions dans les quinze prochaines années pour espérer sauver ces monuments historiques et les peintures murales qu’ils conservent, soit à peu près le triple, ce qui serait parfaitement possible pour une municipalité qui mettrait vraiment cela dans ses priorités.


3. État actuel d’une peinture murale à la basilique
Sainte-Clotilde à Paris
Photo Didier Rykner
Voir l´image dans sa page
4. État actuel d’une peinture murale à la basilique
Sainte-Clotilde à Paris
Photo Didier Rykner
Voir l´image dans sa page

Bruno Julliard et Anne Hidalgo, une fois de plus, racontent n’importe quoi pour cacher leur politique patrimoniale désastreuse qui entérine l’abandon des monuments historiques parisiens. Nous illustrerons cet article avec les photos de deux églises supplémentaires dans un état pitoyable : Saint-Vincent-de-Paul, où l’abside peinte par François-Édouard Picot commence à tomber en morceau (ill. 1) et où le porche est protégé par des filets (ill. 2) pour empêcher que des pierres ne tombent sur les fidèles et les visiteurs, et Sainte-Clotilde où de nombreuses peintures murales sont également en grand état de péril (ill. 3 et 4).

Mais tout cela n’intéresse pas Bruno Julliard et Anne Hidalgo. Ils préfèrent dépenser l’argent de la municipalité pour le ludique et l’éphémère, comme ce spectacle du 31 décembre, sur les Champs-Élysées, qui durera 15 minutes pour 300 000 badauds et qui coûtera la bagatelle de 200 000 € à la ville. Avec une telle somme, celle-ci pourrait restaurer l’équivalent de cinq fois et demi l’abside de Notre-Dame-de-Lorette [3]. On appréciera le sens des priorités de la paire Julliard/Hidalgo. Mais on n’oubliera pas non plus la responsabilité du ministère de la Culture qui ne fait rien pour l’obliger à respecter ses devoirs alors qu’il dispose de l’outil pour le faire : l’article L621-12 du Code du patrimoine qui permettrait d’imposer des travaux d’office. Voilà une lecture que l’on conseille à Fleur Pellerin. Au moins, elle ne pourra pas dire qu’elle n’est pas payée pour.

Vos commentaires

Afin de pouvoir débattre des article et lire les contributions des autres abonnés, vous devez vous abonner à La Tribune de l’Art. Les avantages et les conditions de cet abonnement, qui vous permettra par ailleurs de soutenir La Tribune de l’Art, sont décrits sur la page d’abonnement.

Si vous êtes déjà abonné, connectez-vous.