La statue disparue du tombeau de Bellini au Père Lachaise : un dessin de Carlo Marochetti retrouvé ?

Ayant reçu d’un lecteur de La Tribune de l’Art un courriel au sujet de mon essai sur « les Monuments funéraires de Carlo Marochetti dans les cimetières parisiens » je découvre avec stupeur et émerveillement, dans la pièce qui y est jointe, une sanguine de toute beauté représentant l’ange du monument Bellini (cimetière du Père-Lachaise, 1838).
De la statue, disparue depuis plus d’un siècle, seules les descriptions des critiques ainsi que deux illustrations d’ouvrages contemporains du sculpteur (voir les ill. 7 et 9 de l’essai cité) permettaient de se faire une idée. Grâce à la découverte de ce lecteur et à sa perspicacité, il est désormais permis de contempler ce qui en constitue, semble-t-il, le dessin préparatoire (ill. 1).


1. Attribué à Carlo Marochetti (1805-1867)
Dessin préparatoire de la statue du tombeau de
Vincenzo Bellini
, c.1838
Sanguine sur papier - 52 x 41,5 cm
Collection particulière
Photo : Laurent Delas
Voir l´image dans sa page

Sur la partie supérieure gauche de la feuille, on distingue cette inscription : « Ange par le Baron Marochetti sur la tombe de Bellini au Père Lachaise », inscription qui a lancé le propriétaire de la sanguine sur les traces du sculpteur.
Plusieurs éléments permettent d’attribuer, selon toute vraisemblance, ce dessin à Marochetti :
• Il existe d’autres sanguines attribuées au sculpteur (ill. 2), celles de la statue équestre et des figures du deuxième projet du tombeau de Napoléon (1840).


2. Attribué à Carlo Marochetti (1805-1867)
Dessin préparatoire de figure, profil droit, 1840
Deuxième projet du tombeau de l’Empereur
Sanguine sur papier - 52 x 41,5 cm
Collection particulière
Photo : Caroline Hedengren-Dillon
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• La terrasse sur laquelle repose l’ange correspond à celle représentée sur les gravures illustrant les ouvrages du XIXe consacrés aux monuments funéraires de Paris (cf. supra), les traces en sont encore visibles sur le tombeau aujourd’hui. Le fait que l’ange soit représenté sur son socle prouve bien qu’on a affaire au dessin de la sculpture définitive, telle que Marochetti concevait de la réaliser dans ses moindres détails. De même, les figures du deuxième projet du tombeau de l’Empereur sont présentées assises sur un bloc de pierre formant un angle (ill. 2), l’intention du sculpteur étant de les placer aux quatre angles du monument : « aux quatre angles de ce socle sont assises quatre figures colossales, vieillards athlétiques, la tête enveloppée dans un vaste manteau qui retombe en flottant sur leur corps » [1].
• La grande finesse d’exécution caractérisant le dessin qui nous occupe rappelle les propos de Louis Viardot évoquant « l’exécution très fine et très terminée » [2] de la statue lors de l’inauguration du monument Bellini, en avril 1838.
• Enfin, la provenance du dessin, trouvé dans le Loiret, à proximité de la demeure qu’occupait Philibert Marochetti, deuxième fils du sculpteur (mort sans postérité), ne laisse plus, à mon sens, planer le moindre doute. Une mésentente entre sa veuve et son frère Maurizio expliquerait le fait que les œuvres dont il avait hérité n’aient pas été restituées au fils aîné du sculpteur.

Il paraît peu convaincant, au vu de tous ces éléments, d’émettre des réserves. Cependant, la découverte de cette œuvre est si récente qu’il faut rester prudent.
Le plus important n’est-il pas de posséder enfin de l’ange de Marochetti un témoignage visuel d’une grande valeur artistique ?
Après le dessin préparatoire, aurons-nous la chance de voir la statue surgir de l’oubli ?
Grâce à La Tribune de l’Art et à ses lecteurs avisés, cela semble possible !

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