Dans le communiqué de presse distribué hier à propos de la reconstruction de la flèche de Saint-Denis, la ministre de la Culture ose écrire qu’elle « a décidé de suivre les recommandations de la Commission nationale » (des monuments historiques) en donnant son accord au lancement des études.
C’est faux.
Car bien que le compte-rendu de cette réunion n’ait pas encore été diffusé, nous avons pris soin d’interroger deux personnes y ayant participé, l’une ayant voté en faveur de la reconstruction, et l’autre ayant voté contre. Les deux nous ont confirmé que la Commission nationale des monuments historiques s’était opposée à la reconstruction de la flèche. Un « non » ferme et définitif. Ce qu’Audrey Azoulay traduit par : « La commission […] a émis des réserves au regard des principes généraux de restauration des monuments historiques et de l’ancienneté du démontage de la flèche. » On ne doit pas parler la même langue.
Et ce n’est que pour répondre à la question de la ministre sur ce qu’il conviendrait de faire si elle décidait envers et contre tout d’autoriser ce chantier que la Commission a énoncé quelques études complémentaires à mener. Si la ministre avait suivi l’avis de la Commission, elle aurait refusé l’idée même de la reconstruction.
Audrey Azoulay, qui a le droit de passer outre l’avis de la commission, n’a même pas le courage de le dire tout haut. Cela ne signifie pas néanmoins, comme on le lit partout dans la presse, qu’elle a donné son autorisation à la remontée de la flèche. S’il est probable que « le massif occidental de la basilique pourra supporter sans dommage le chantier et le poids d’une tour et d’une flèche reconstruite » (tout est possible, il suffit d’y mettre le prix), et si « faire la preuve du caractère exceptionnel du chantier de la flèche en matière d’utilité sociale, d’adhésion et de participation populaire » est une exigence tellement vague et immatérielle qu’il suffira de décréter qu’elle est remplie, démontrer que « l’opération sera autofinancée par les recettes de visite du chantier et par le mécénat » sera certainement beaucoup plus difficile.
Nous ne nous faisons pas d’illusion cependant : tout le monde aura compris que cette consultation de la CNMH était totalement biaisée et n’avait pour objectif que de court-circuiter les opposants. Ce qui est sûr, en revanche, c’est qu’Audrey Azoulay passe ses dernières semaines au ministère de la Culture et que ce n’est pas elle qui donnera l’autorisation définitive, si celle-ci devait un jour être donnée.