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L’Échange. Les dessous d’une négociation artistique entre la France et l’Espagne, 1940-1941

Auteurs : Cédric Gruat et Lucía Martínez

Amer dossier que celui des échanges artistiques franco-espagnols de 1941 ! Il méritait bien une soigneuse étude comme celle que viennent de lui consacrer Cédric Gruat et Lucía Martínez, même si, faisons la part des silences pudiques, l’affaire restait moins oubliée que ne le prétendent les auteurs [1]. D’autant que l’actualité, comme souvent, rattrape le passé : depuis quelque temps, les médias, toujours friands de scandales, bruissent singulièrement de toutes sortes de problèmes de restitutions d’œuvres d’art. N’est-il pas infiniment plaisant de stigmatiser entre autres la (formelle) avidité des musées ? En fin de compte, quelles légitimités privilégier, car il y en a plusieurs qui s’entrechoquent ? Entendre d’abord les droits de l’usage, du patrimoine et de l’histoire ou bien ceux de l’origine ? Et comment régler les contentieux qui surgissent ? Des échanges, s’il y a lieu, peuvent-ils être jamais équitables, les compensations suffisantes [2] ? L’alerte livre à deux mains, donc à double source d’archives – françaises et espagnoles, c’est son intéressante nouveauté – qui sort chez Armand Colin, met en valeur un cas exemplaire de leçon de l’Histoire. Qu’il suffise malgré la radicale différence des contextes – on n’est plus aujourd’hui en guerre, comme en 1940, heureusement ! – de songer aux infortunés manuscrits coréens de la Bibliothèque nationale de France [3] : affaire ardue et toujours pendante (y aura-t-il bien dépôt et même compensation ?). Sévit une fois de plus l’intrusion du politique dans le monde de l’art et des collections publiques, des réalités tellement délicates et fragiles qu’il ne faudrait pas, entre nous soit dit, que trop de non-professionnels s’en mêlent. Mais voilà bien un discours horriblement corporatiste… À l’occasion d’ailleurs, on le verra plus loin, les spécialistes eux-mêmes peuvent décevoir !

1. Ve-IVe siècle avant J.-C.
La Dame d’Elche
Madrid, Musée archéologique
(échanges franco-espagnols de 1941)
Photo : D. R.
Voir l´image dans sa page

De l’enquête de Cédric Gruat et Lucía Martínez ressort bien que la très rapide acceptation, côté français, de revendications espagnoles émises depuis un fort précoce septembre 1940 [4], – autant parler de capitulation en rase campagne – procède volens nolens d’un véritable choix du « prince [5] », choix à l’envers hélas !, puisque l’idée fut imposée depuis Madrid. Il faut dire que la IIIe République finissante, nommant le maréchal Pétain ambassadeur de France en Espagne, avait en quelque sorte forcé, au moins involontairement, le destin et dangereusement préparé le terrain. La mission confiée par Daladier, président du Conseil, à l’ancien vainqueur de Verdun, tout auréolé de sa gloire, n’était-elle pas de réconcilier – du moins pouvait-on se l’imaginer – une neuve et arrogante Espagne franquiste, trop fraîchement victorieuse, encore assoiffée de vengeance et de rancune, et une vénérable République française passablement gênée aux entournures, restée…

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