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Les Portraits de Gauguin

Londres, The National Gallery, du 7 octobre 2019 au 26 janvier 2020

1. Paul Gauguin (1848-1903)
Le Sorcier d’Hiva Oa, 1902
Huile sur toile
Liège, Musée des beaux-Arts, La Boverie
Photo : Liège, Musée des beaux-Arts, La Boverie
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Paul Gauguin était un artiste narcissique, un père et un mari indigne, un pervers amateur de très jeunes filles : tel est le - sombre - portrait que dresse de lui la National Gallery de Londres, à l’occasion de l’exposition - éblouissante - qu’elle consacre justement aux portraits que le maître réalisa, sur toile, sur papier, dans la terre et le bois. C’est dans l’ère du temps sans doute, de souligner les noirceurs de l’homme plutôt que de célébrer le talent de l’artiste. Mais contrairement au discours qui les accompagne, les chefs-d’œuvre venus du monde entier et réunis à Londres mettent bel et bien en valeur son génie. Et sans doute aurait-on préféré que les panneaux qui scandent le parcours fournissent davantage d’analyses artistiques et moins de jugements biographiques. La définition du synthétisme par exemple se réduit à un mouvement «qui défend un art pictural haut en couleurs et très stylisé». Heureusement, un petit livret donné au visiteur propose un commentaire plus détaillé pour chaque œuvre.

La question du portrait dans la création de Gauguin est d’autant plus intéressante que la limite du genre est floue : les modèles sont-ils représentés pour eux-mêmes ? Sont-ils les personnages d’une scène de genre ou d’une allégorie ? Sont-ils considérés comme de simples motifs, agencés différemment d’une composition à l’autre ? Le Sorcier d’Hiva Oa par exemple (ill. 1) apparaît sur un autre tableau (non exposé) L’Incantation ou Apparition vêtu de couleurs différentes, tandis que les femmes à l’arrière-plan se retrouvent dans la même posture au centre d’une troisième peinture, L’Appel .


2. Paul Gauguin (1848-1903)
Autoportrait au Christ jaune, 1890-1891
Huile sur toile - 38 x 46 cm
Paris, Musée d’Orsay
Photo : RMN-GP/ René-Gabriel Ojéda
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3. Paul Gauguin (1848-1903)
Pot anthropomorphe
Grès émaillé - H. 28,4 cm, D. 23 cm
Paris, Musée d’Orsay
Photo : RMN-GP/ Hervé Lewandowski
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Le parcours s’ouvre sur des autoportraits, et celui du Musée d’Orsay est triple (ill. 2) : Paul Gauguin trône entre deux de ses œuvres, le fameux Christ jaune et un grès anthropomorphe, également prêté par Orsay pour être exposé en regard du tableau (ill. 3). Visage grimaçant, pouce dans la bouche, l’artiste désigna cette céramique comme une «tête de Gauguin le sauvage» dans une lettre adressée à Madeleine Bernard. Il se peint donc ici comme dieu, martyr et sauvage. Il prêtait déjà ses traits à Jésus dans le Jardin des Oliviers, peignit aussi un Autoportrait au Golgotha, suggérant non seulement qu’il était incompris, injustement crucifié par la critique et le public, mais aussi qu’il avait un pouvoir créateur. «On dit que Dieu prit dans sa main un peu d’argile et fit ce que…

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