Whistler, l’effet papillon

C’est une gageure que de vouloir révéler l’influence d’un artiste sans montrer les œuvres charnières de sa carrière. Le Musée des Beaux-Arts de Rouen prend le risque avec James Abbott McNeill Whistler. Ni la célèbre Symphonie en blanc n° 1 (1862) ni la fameuse Nocturne en noir et or : la fusée qui retombe (1875) n’ont fait le déplacement, peut-être trop fragiles ou trop iconiques pour être prêtées.

1. James Abbott McNeill Whistler (1834-1903)
Rouge et noir ; l’éventail, 1891-1896
Huile sur toile - 187,4 x 89,8 cm
Glasgow The Hungarian University
Photo : The Hungarian University of Glasgow

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Il ne s’agit pas d’une rétrospective, mais d’une confrontation des œuvres du maître à celles de ses contemporains et des générations suivantes (ill. 1 et 2). Les commissaires, Laura Valette [1] et Florence Calame-Levert, souhaitent ainsi rappeler le rôle déterminant de Whistler en montrant qu’il fut une source d’inspiration pour nombre d’artistes. Car l’impact de son art semble avoir été négligé par l’histoire de l’art. Si le peintre a bénéficié ces dernières années de plusieurs expositions aux États-Unis, la dernière rétrospective en France remonte à 1995 [2]. Sans doute parce que Whistler est inclassable. Sa patrie tout d’abord, quelle était-elle ? Artiste américain, partagé entre l’Angleterre et la France, il avait tout le charme et les défauts du dandy, qu’il fût londonien ou parisien. À quel mouvement appartenait-il ? Là encore, difficile à dire. Avec leurs contours qui s’estompent, leurs couleurs sourdes et réduites, ses peintures ne sont ni réalistes - il fut pourtant un grand ami de Courbet - ni impressionnistes - il était lié à Monet, mais refusa de participer à la première exposition du groupe en 1874 - ni même symbolistes. Elles sont whistlériennes. En effet le « whistlérisme » fut un terme utilisé dès les années 1880 par les critiques français et anglais.

2. Sidney Starr (1857-1925)
Étude en bleu et gris, 1891
Huile sur toile - 190,5 x 107,3 cm
Londres, Tate Gallery
Photo : Tate Gallery

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L’exposition de Rouen cherche ainsi à décliner l’effet papillon de sa peinture en un parcours thématique qui mélange peintures, œuvres sur papier, objets d’art... Il y a aussi des sculptures de Rodin préparatoires au monument en sa mémoire resté inachevé, des photographies diverses, des cyanotypes de Paul Burry, des faïences de Felix Bracquemond et de Moreau-Nélaton ou bien encore des verres Tiffany, des éventails et des estampes japonaises qui évoquent l’importance du japonisme chez Whistler et ses contemporains. Cependant, sur les 188 œuvres exposées, cinquante-cinq - seulement - sont de Whistler, dont quinze - seulement - sont des peintures. Est-ce suffisant pour montrer l’influence qu’il exerça ?
Les estampes - eaux fortes et lithographies - constituent un aspect un peu oublié de son œuvre qui mérite d’être mis en valeur, notamment ses nocturnes et ses…