Une souscription pour Rennes lancée par la Sauvegarde de l’Art français et La Tribune de l’Art

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13/6/24 - Souscription - Rennes, Musée des Beaux-Arts - La valeur n’attend pas le nombre des années et certains artistes précoces ont produit des chefs-d’œuvre dès leur plus jeune âge. Mais les plus émouvants sont ceux qui, disparus très tôt, laissent néanmoins une poignée d’œuvres remarquables.
Nous parlerons ici d’un peintre presque inconnu, et pour cause : il est mort à l’âge de dix-sept ans, quelques jours avant son dix-huitième anniversaire. Pourtant, les quelques tableaux et dessins conservés ainsi que sa courte biographie montrent qu’il aurait probablement connu une brillante carrière.

Il s’agit de Louis-François Roulin, qui fut élève d’Ingres et d’Alexandre Colin. Né dans une commune jouxtant Rennes, dont son père scientifique et illustrateur du Règne animal de Georges Cuvier, était originaire, il est mentionné dès 1832 dans les registres des élèves de l’École des Beaux-Arts, soit à l’âge de onze ans. Et c’est en 1834, à seulement treize ans, qu’il se présente pour la première fois au concours du prix de Rome, passant même avec succès la première épreuve d’esquisse, même s’il échoua à la deuxième, celle de la figure peinte.


1. Louis-François Roulin (1821-1839)
La Mort du consul Octavius, 1835
Huile sur toile - 32,5 x 40,5 cm
Paris, École nationale
supérieure des Beaux-Arts
Photo : Ensba
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2. Louis-François Roulin (1821-1839)
Tobie rendant la vue à son père, 1835
Huile sur toile - 43,5 x 55,5 cm
Angers, Musée des Beaux-Arts
Photo : Musée des Beaux-Arts d’Angers
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L’année suivante, il remporta le 1er prix du concours d’esquisse avec La Mort du consul Octavius (ill. 1) et se qualifiea, à quatorze ans donc, pour entrer en loges pour la dernière épreuve du prix de Rome. S’il ne l’obtint pas - aucun prix ne fut accordé cette année - il fut tout de même couronné d’un 1er Second prix avec Tobie rendant la vue à son père dont l’esquisse est conservée au Musée des Beaux-Arts d’Angers (ill. 2). En 1836, bien qu’ayant encore une fois réussi les deux premières épreuves, il échoua à nouveau. Ce n’était que son troisième essai, et il avait seulement quinze ans. Nul doute que s’il avait pu persister, il aurait été lauréat. En 1838, il partit pour Rome, sans doute pour se perfectionner avant de tenter à nouveau le concours. Mais, malade, il mourut l’année suivante en 1839.


3. Louis-François Roulin (1821-1839)
Moïse sur la montagne, 1839
Huile sur toile - 310 x 225 cm
Le Blanc, église Saint-Génitour
Photo : Inventaire général région Centre
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4. Louis-François Roulin (1821-1839)
La Foi
Crayon et rehauts
d’aquarelle - 19,5 x 11,8 cm
Paris, collection particulière
Photo : Didier Rykner
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En 1838, il avait exposé un Moïse exposé sur les eaux (de localisation inconnue) et en 1839 un autre tableau, à nouveau Moïse mais cette fois âgé, sur la montagne. Le tableau est acquis par l’État qui l’envoie à l’église Saint-Génitour de Le Blanc dans l’Indre, où il se trouve toujours. La photo, hélas de qualité médiocre, que l’on peut voir sur la base Palissy (ill. 3), démontre toute l’autorité dont ce peintre si jeune fait déjà preuve. On peut citer ici aussi une aquarelle passée en vente il y a quelques années chez Bonhams à New York, et un dessin inédit représentant La Foi (ill. 4) qui se trouve dans une collection particulière parisienne.


5. Louis-François Roulin (1821-1839)
Autoportrait, 1837
Huile sur toile - 51 x 43,5 cm
Collection particulière
Photo : Guillaume Kazerouni
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Nous avions, il y a quelques années, lancé avec la complicité de l’association La Sauvegarde de l’Art français, une souscription pour l’acquisition d’un tableau d’Eugène Devéria qui est désormais accroché au Musée des Beaux-Arts d’Orléans dans la salle des grands formats (voir la brève du 21/2/18). C’est une opération semblable (la [page de la souscription est ici) que nous commençons aujourd’hui pour l’achat d’un superbe Autoportrait de Louis-François Roulin (ill. 5) afin de l’offrir au Musée des Beaux-Arts de Rennes. Le montant de l’acquisition est très raisonnable puisqu’il s’agit de seulement de 4 500 €. L’œuvre appartient à un particulier, héritier de l’artiste, qui l’a spontanément proposée à Guillaume Kazerouni, en charge des collections anciennes du musée breton. Celui-ci s’est à juste titre enthousiasmé pour cet Autoportrait qui aura sa place toute trouvée au musée. Pas seulement parce que Roulin était rennais, mais surtout parce que le tableau, daté de 1837, est saisissant, d’un romantisme d’autant plus prégnant que l’on sait que le jeune peintre est proche de la mort. Même s’il ne devait disparaître que deux ans plus tard, sa complexion maladive se distingue dans ses traits fatigués et son teint terreux.
Il est à noter que le musée rennais, qui ne possédait aucune œuvre de la production réduite de Roulin, conserve un fonds Jean-Germain Drouais. Cet élève de David, dans lequel celui-ci plaçait beaucoup d’espoirs, mourut à Rome, lui aussi très jeune comme Roulin, à l’âge de vingt-cinq ans.


6. Louis-François Roulin (1821-1839)
Autoportrait, 1837
Huile sur toile - 51 x 43,5 cm
Collection particulière
Photo : Guillaume Kazerouni
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Nous remercions donc tous les lecteurs de La Tribune de l’Art qui permettront grâce à leurs dons d’offrir au Musée des Beaux-Arts de Rennes ce beau tableau. Si la somme de 4 500 € est dépassé, le montant supplémentaire sera utilisée pour financer la restauration (assez légère car l’œuvre est dans un bon état, et sur sa toile d’origine) et celle du cadre (ill. 6).

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