- Le pavillon des Sources en octobre 2023
Photo : Didier Rykner - Voir l´image dans sa page
Comme nous aimons donner leur chance aux nouveaux arrivants, nous ferons crédit pour cette fois à Rachida Dati. Elle doit penser sincèrement qu’elle a trouvé la bonne solution pour sauver le pavillon des Sources de Marie Curie : le déplacer de quelques mètres pour le conserver, accolé à l’énorme construction de cinq étages qui était prévue.
Admettons une seconde que ce plan soit véritablement mis en œuvre : quel sens cela aurait-il ? Comme nous l’avons déjà écrit, ce pavillon a un intérêt historique, bien davantage qu’architectural, en lien avec les deux autres qui formaient à l’origine l’Institut du radium. Ce qui en fait le charme, c’est l’ensemble, incluant le jardin et les arbres plantés par Marie Curie.
Tout cela disparaîtra dans cette opération, et la sauvegarde du pavillon des Sources ne sera qu’une victoire à la Pyrrhus.
Mais que va-t-il se passer en réalité, avec une probabilité de quasiment 100 % ? Ce qui est arrivé pour tous les « sauvetages » de monument soi-disant mis en œuvre depuis que l’on se préoccupe de la conservation du patrimoine : l’édifice ne sera JAMAIS reconstruit.
Le dernier exemple est celui de la halle Eiffel que Françoise Nyssen proclamait avoir sauvé et dont nous annoncions déjà que le remontage n’aurait jamais lieu (voir l’article). Elle rouille depuis en pièces détachées dans une décharge (voir l’article).
Nous renvoyons ceux qui en douteraient à cet article où nous faisions la liste de tous les bâtiments ou portions de bâtiments qui devaient ainsi être reconstruits, parfois sur leur emplacement d’origine. Tous, sans exception, sont définitivement perdus. Même la Chancellerie d’Orléans : c’est tout le monument qui devait être déplacé. Seuls les décors ont pu être remontés un siècle plus tard, comme des period-rooms.
Le pire, c’est sans doute qu’au bout de quelques années, de quelques mois même, toutes les promesses sont oubliées, pas seulement de ceux qui les avaient faites, mais aussi de ceux qui les avaient crues. Et encore davantage des journalistes qui passent à autre chose. Le crime parfait, comme celui auquel nous assistons en ce moment à l’Institut Curie.
Et Rachida Dati aura beau, comme nous le disons, être sincère dans sa décision, quand il s’agira de reconstruire le pavillon, elle ne sera plus ministre, et tout le monde aura oublié l’engagement du maître d’œuvre. Pire : la même chose se reproduira, encore et encore, pour d’autres monuments que l’on pourra détruire avec promesse de les remonter plus tard, à Pâques ou à la Trinité...
Le seul avantage que nous y voyons, malgré son caractère dérisoire, est la bonne volonté évidente de la nouvelle ministre sur laquelle nous comptons pour rétablir l’autorité du ministère de la Culture. Espérons néanmoins qu’elle saura s’entourer d’un conseiller patrimoine et musées solide qui connaisse bien ces questions et qui pourra l’aider à l’avenir à faire les bonnes décisions.
Une chose encore pour conclure : nous aimerions qu’elle se penche sur deux dossiers plus ou moins récents de reconstructions promises afin de, si cela est encore possible, les mettre en œuvre. Après tout, la continuité du ministère de la Culture a un peu à faire avec la continuité de l’État… Nous demandons donc le remontage de la halle Eiffel d’Arles et celui de l’hôtel Texier, à Paris (voir à nouveau cet article).