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Nuits électriques

Le Havre, Musée d’art moderne André Malraux, du 3 juillet au 1er novembre 2020.

1. Charles Marville (1813-1879)
Lampadaire devant l’hôtel Rothschild, à l’angle de la rue de Rivoli et de la rue Saint-Florentin, vers 1865
Photographie sur papier albuminé montée sur carton - 35,8 x 25,6 cm
Paris, Bibliothèque de l’Hôtel de Ville
Photo : BHDV/Roger-Viollet
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C’est un joli pied de nez : alors que l’édition 2020 du festival Normandie impressionniste avait pour thème « la couleur, au jour le jour », c’est dans les profondeurs de la nuit qu’a choisi de s’aventurer le MuMa du Havre. Une nuit urbaine parfois sombre mais souvent étincelante, une nuit qui s’éclaircit au fil du siècle grâce aux progrès de l’éclairage urbain : le thème s’imposait pour ce musée baigné de lumière, bâtiment de verre et d’acier qui fut la première des maisons de la culture édifiées en France sous l’égide d’André Malraux. Nuits électriques s’impose aisément comme l’une des plus séduisantes expositions de la saison, mêlant habilement peinture, photographie (ill. 1) et cinéma dans un parcours structuré en une dizaine de sections pour lesquelles le motif du réverbère a servi en quelque sorte de fil rouge. Au sein du catalogue, un passionnant essai du brillant historien Dominique Kalifa [1] retrace l’histoire de l’éclairage artificiel urbain, où l’électricité succéda au gaz, tout en analysant ses conséquences économiques et sociales. Becs de gaz ou lampadaires électriques, les réverbères racontent une histoire de la modernité et occupent parfois une place centrale dans les tableaux de l’époque, comme dans Rue de Paris, temps de pluie de Gustave Caillebotte dont l’exposition présente l’étude peinte (ill. 2) prêtée par le Musée Marmottan.


2. Gustave Caillebotte (1848-1894)
Rue de Paris, temps de pluie, 1877
Huile sur toile - 54 x 65 cm
Paris, Musée Marmottan-Monet
Photo : Bridgeman Images/C. Baraja
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Avec le photographe Charles Marville, le réverbère se transforme en objet d’art : c’est l’objet de la deuxième salle de l’exposition et d’un intéressant essai du catalogue, rédigé par Françoise Reynaud, ancienne responsable des collections photographiques du Musée Carnavalet. Si celui-ci, en travaux, n’a pas prêté d’œuvres pour l’occasion, le Musée des Arts décoratifs et la Bibliothèque de l’Hôtel de Ville de Paris ont permis de pallier ce manque. On n’y admire bien sûr aucune scène nocturne : il faudra attendre la fin des années 1880 pour que la photographie puisse capter les sources lumineuses de l’éclairage artificiel. Les campagnes photographiques de Charles Marville étaient destinées à faire rayonner par-delà les océans - deux albums furent ainsi envoyés à Melbourne à l’occasion de l’Exposition internationale de 1880 puis furent offerts par la France à la State Library of Victoria - l’élégance et la richesse de l’aménagement urbain de la capitale moderne qu’était devenue Paris. Quelle ironie, pour le visiteur familier des rues parisiennes d’aujourd’hui, de voir…

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