MiróMatisse. Au-delà des images

Chacun d’eux donna une réponse inattendue : lorsque Louis Aragon interrogea Henri Matisse sur les artistes contemporains et lui demanda lequel, Picasso mis à part, était un « peintre véritable », le maître prononça le nom de Bonnard avant d’ajouter : « Miró… oui Miró… Parce qu’il peut bien représenter n’importe quoi sur sa toile… Mais si, en un certain point, il a placé une tache rouge, vous pouvez être assuré que c’était là, et pas ailleurs, qu’elle devait être… Enlevez-la, le tableau tombe. [1] ». Le pianiste Alain Planès posa la même question à Miró : « Un jour j’ai demandé à Joan : "Mais pour vous quel était le plus grand peintre du siècle ?" À part lui bien sûr. Et il a répondu : "Henri Matisse". C’est vrai que j’aurais pensé qu’il allait dire Picasso. Il n’a rien expliqué car il n’était pas expansif. [2] ».Joan Miró reprit cette idée dans une note manuscrite à la fin de sa vie, définissant la Trinité des peintres du XXe siècle : « Picasso est un dieu. Matisse, un grand peintre. Miró un grand esprit. Esprit vivificateur qui est partout [3] », en toute simplicité.

1. Henri Matisse (1869-1954)
Les Coloquintes, 1915-1916
Huile sur toile - 65,1 x 80,9 cm
New York, The Museum of Modern Art
Photo : MoMA
© Succession Henri Matisse

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2. Joan Miró (1893-1983)
Nature morte II (La Lampe à carbure), 1922-1923
Huile sur toile - 38,1 x 45, 7 cm
New York, The Museum of Modern Art
Photo : MoMA
© Successió Miró/ADAGP, Paris, 2024

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Miró-Matisse : on ne voit pas bien ce qui relie ces deux artistes que vingt-cinq années séparent, l’un chef de fil du fauvisme, peintre du « bonheur de vivre », auteur d’œuvres volontairement décoratives, créateur d’« harmonies » de couleurs, l’autre, figure du surréalisme, peintre onirique aux œuvres chaotiques, aux couleurs discordantes.
Pourtant le Musée Matisse de Nice propose une confrontation inédite et convaincante (ill. 1 à 5). Cette exposition [4]…