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Les Senn, collectionneurs et mécènes

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Le Havre, Musée, du 16 novembre 2024 au 16 février 2025. Prolongé jusqu’au 23 février 2025.


Certains beaux-pères sont facétieux, celui d’Olivier Senn s’appelait Ernest Siegfried, il détestait la peinture contemporaine et trouvait les goûts artistiques de son gendre contestables pour ne pas dire douteux. Aussi décida-t-il de lui offrir des peintures exposées au Salon des Indépendants de 1905 et choisit avec soin l’art qui lui paraissait « le plus loufoque et le plus laid [1]  ». Veillant tout de même à ne pas dépasser les 100 francs par tableau, il en acquit cinq, d’André Derain (ill. 1), de Maurice de Vlaminck, d’Auguste Matisse également qu’il semble avoir pris pour Henri ; une confusion uniquement due à leur homonymie qui semblait courante puisque Auguste fut fait chevalier de la Légion d’honneur à la place d’Henri Matisse.


1. André Derain (1880-1954)
Le Vieil Arbre, 1904
Huile sur toile - 41 x 33 cm
Paris, Centre Pompidou
Photo : RMN-GP/Ph. Migeat
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Il faut croire qu’Olivier Senn fût enchanté de son cadeau, il conserva en tout cas ces peintures près de quarante ans. Né en 1864 au Havre, ce négociant en coton était un collectionneur avisé, tout comme Charles-Auguste Marande. Avec lui et quelques autres entrepreneurs ainsi que plusieurs artistes - Braque, Dufy, Friesz... - , il fonda en 1906 le Cercle de l’Art Moderne, dont l’objectif était de réunir dans la ville normande les « peintres, sculpteurs, musiciens, architectes, littérateurs et les amateurs d’art attirés par sympathie commune pour les tendances artistiques modernes [2] ». Le Musée du Luxembourg à Paris avait consacré une exposition (voir l’article) à cette effervescence artistique du Havre due à la présence de riches négociants : « Pas de coton, pas de tableaux » avait ainsi résumé Boudin.

Olivier Senn réunit une collection de plus de 500 œuvres - peintures, dessins, sculptures - dans laquelle les impressionnistes occupaient une place importante. Après sa mort ses deux enfants Édouard et Alice en héritèrent, son fils ainé Edouard-Ernest étant mort au combat durant la Première Guerre mondiale. La fille d’Édouard, Hélène Senn-Foulds a décidé en 2004 de donner au musée André-Malraux du Havre la collection héritée de son grand-père : 250 œuvres en tout, parmi lesquelles des peintures de Boudin, Monet, Sisley, Renoir, Degas, Pissarro, sans oublier Sérusier et Marquet, mais aussi Courbet et Delacroix (voir la brève du 8/12/04)... Et comme Edouard Senn avait lui aussi acheté des peintures contemporaines, Hélène Senn-Foulds offrit de nouveau au MuMA, en 2009, soixante-sept œuvres héritées de son père, parmi lesquelles une aquarelle de Pablo Picasso, Le Mendiant de 1904, et un paysage de Nicolas de Staël peint en 1955. En 2014, dix-sept nouvelles œuvres issues de la collection d’Olivier Senn entrèrent au MuMa grâce à Pierre-Maurice Mathey, petit-fils par alliance de l’entrepreneur.


2. Giorgio de Chirico (1888-1978)
La Tour rouge, 1913
Huile sur toile - 73,5 x 100,5 cm)
Venise, Peggy Guggenheim Collection…

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