Le gouvernement d’Emmanuel Macron multiplie les attaques contre la liberté de la presse. Qu’il s’agisse du projet de sortir la diffamation et l’injure de la loi de 1881 (voir cette tribune) ou de la convocation par la police de journalistes enquêtant sur des dossiers sensibles (voir par exemple cet article), il est probable que la place déjà pas très glorieuse de la France dans le classement de Reporters sans frontières (32ème sur 180 pays) va encore baisser.
- Nous aurions aimé illustrer cet article avec une photo de l’intérieur de
Notre-Dame en cours de consolidation. Nous ne le pouvons pas... - See the image in its page
Il y a aussi les petites attaques, trop modestes pour qu’elles donnent lieu à une levée de boucliers, mais malgré tout réelles, comme celles dont est victime actuellement La Tribune de l’Art de la part du ministère de la Culture.
Oh, nous sommes bien invités à toutes les occasions par le ministre aux points presse divers, qu’il s’agisse de la « rencontre du Réseau Micro-Folies » le 16 septembre prochain ou même à des événements qui nous concernent directement comme le lancement de la deuxième saison de la mission Bern (voir notre article). Le ministère peut ainsi prétendre qu’il ne nous pénalise pas. Mais pour le chantier de Notre-Dame, que nous suivons au plus près depuis le premier jour en publiant régulièrement des articles bien informés et contenant souvent des informations exclusives, nous faisons face à un boycott complet du ministère.
Tout de suite après l’incendie, nous avions demandé à avoir un accès au chantier (sur lequel d’autres médias ont pu se rendre). On a alors osé nous faire la morale (voir l’article). Puis, régulièrement, nous avons demandé aussi bien auprès des services du général Georgelin que de la DRAC Île-de-France ou du cabinet du ministre à pouvoir entrer dans la cathédrale. On nous a toujours répondu non, quand on nous a répondu. La dernière réponse, datant du 20 juin, était celle-ci : « Je fais suite à votre demande ci-dessous. Celle-ci m’a été transférée par les services de Monsieur Georgelin, car le ministère de la Culture centralise l’ensemble des demandes presse. Pour le moment, la cathédrale est toujours en procédure d’urgence. Les visites presse sont de ce fait, extrêmement réduites. Je reviens vers vous dès que l’horizon se dégage. »
Manifestement l’horizon s’est dégagé, mais pas pour La Tribune de l’Art puisque « Franck Riester, a convié une partie de la presse à découvrir les lieux. » comme on le lit dans cet article du Parisien, paru hier. Ceci après de nombreux autres journaux déjà autorisés à visiter la cathédrale pendant les travaux de sécurisation. Pourtant, nous n’avons pas été invités par le ministre…
Il faut comprendre que, pour un journal comme le nôtre, qui met l’affaire de l’incendie de Notre-Dame au cœur de ses préoccupations (nous lui avons déjà consacré pas moins de 39 articles en trois mois), ne pas pouvoir suivre les travaux de près est extrêmement pénalisant. Plus ennuyeux encore, ne pas pouvoir entrer dans la cathédrale nous empêche de prendre des photos. À moins d’acheter celles-ci à prix d’or à nos confrères ou à des agences de presse, nous ne pouvons donc pas illustrer nos articles.
Tout cela pourrait paraître bénin mais constitue en réalité une grave distorsion de concurrence que rien ne justifie, si ce n’est la ligne éditoriale de La Tribune de l’Art très critique envers le ministère et la gestion de cette affaire par le président de la République. Cela favorise les plus gros médias qui n’ont pourtant pas mieux informé sur l’incendie de la cathédrale que nous ne l’avons fait. Imaginons une seconde une visite de presse des installations olympiques en cours de construction à laquelle ne serait pas invitée L’Équipe… C’est bien parce que La Tribune de l’Art se situe clairement dans une opposition à la politique du ministère sur ce dossier que nous sommes boycottés. Il s’agit indiscutablement d’une atteinte à la liberté de la presse.