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Boldini. Les plaisirs et les jours

Paris, Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, du 29 mars au 24 juillet 2022.


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Chantre de l’élégance, Giovanni Boldini fut aussi le peintre du snobisme, portraitiste d’une société parisienne dont les conversations de salon, en 1914, ne portaient pas sur les tensions avec l’Allemagne, mais sur la pensée et sur la personnalité de Bergson [1]. Les dames se pressaient alors aux conférences du philosophe et s’arrachaient la dernière création du grand couturier Charles Frederick Worth : une robe de dîner appelée « M. Bergson a promis de venir ». Ce gratin que Boldini captura avec son pinceau, Proust le décrivit avec sa plume. Bien qu’ils ne fussent pas issus du même milieu, tous deux fréquentèrent les mêmes cercles, et le Petit Palais, qui consacre une rétrospective au peintre, place l’écrivain en miroir, choisissant pour titre de l’exposition, Les Plaisirs et les Jours.


1. Giovanni Boldini (1842-1931)
Portrait du comte Robert de Montesquiou, 1897
Huile sur toile - 115,5 x 82,5 cm
Paris, Musée d’Orsay
Photo : bbsg
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Ainsi Robert de Montesquiou inspira à Marcel Proust le personnage du baron de Charlus - et à Huysmans celui de Des Esseintes - tandis que Giovanni Boldini peignit son portrait, célèbre (ill. 1), dans lequel il lui donne une attitude qui semble illustrer ce mot de Balzac : « l’esprit d’un homme se devine à la manière dont il porte sa canne [2] ». Il utilise en outre un camaïeu de gris et de noir qui n’est pas sans évoquer le beau portrait par Raphaël de Baldassare Castiglione, auteur du Livre du Courtisan. Montesquiou fut l’incarnation revendiquée du snobisme qu’il définissait par « le fait et le goût de se sentir amplifié par des accointances supérieures [3] ». Lui qui s’auto-proclama « souverain des choses transitoires [4] » fut donc représenté par un artiste qui avait entrepris de peindre « tout ce qui n’est pas la vie essentielle [5] ». Ils étaient faits pour s’entendre.
Boldini côtoya aussi la comtesse Greffulhe qui inspira probablement le personnage de la duchesse de Guermantes. Elle déclarait qu’il était l’un de ses peintres favoris, en prenant soin pourtant, de ne pas poser pour lui. Car l’artiste aimait un peu trop montrer les charmes de ses modèles féminins, et si la princesse Marthe-Lucile Bibesco en 1911 s’enthousiasma pour son portrait, se disant prête à payer le tableau au prix de son collier d’émeraudes et de toutes les perles du monde, son mari refusa la toile, jugeant inconvenant le décolleté de son épouse (ill. 2). Quant à l’entrepreneur sicilien Ignazio Florio, il fut scandalisé que sa femme ressemblât à une cocotte parisienne.
Actrices, cantatrices, écrivains, riche bourgeoisie et haute aristocratie, le grand et le demi-monde se mêlaient dans les salons comme dans l’atelier de Boldini (ill. 3). Bien plus qu’un peintre à la mode, il dictait la mode. « Il y avait des femmes qui s’habillaient à la Boldini ; on racontait que la…

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