Palais de la Légion d’honneur : l’enfer pavé de bonnes intentions

1 1 commentaire

Nous avons pu rencontrer les responsables des bâtiments du Palais de la Légion d’Honneur qui nous ont présenté les projets en cours ayant abouti à l’installation d’un mur de verre devant la façade donnant vers la Seine (voir la brève du 1/10/14).


1. Salon de la Rotonde
Paris, Palais de la Légion d’Honneur
Photo : Gilles Targat
Voir l´image dans sa page
2. Salon des Grands Chanceliers
Paris, Palais de la Légion d’Honneur
Photo : Gilles Targat
Voir l´image dans sa page

Cela nous a convaincu, une fois de plus, que le système des monuments historiques tel qu’il existe fonctionne très mal. Car les intentions de la chancellerie de la Légion d’Honneur ne sont pas mauvaises, bien au contraire. Celle-ci mène depuis quelques années un grand chantier de restauration du monument qui a porté ses fruits. Signalons notamment la restauration de plusieurs des salons (le salon de la Rotonde - ill. 1, le salon des Grands Chanceliers - ill. 2, le salon des Muses, le salon de l’Aurore) et du vestibule, celle, en cours, de la salle du Conseil de l’Ordre où le plafond, représentant un ciel nuageux et datant peut-être d’avant l’incendie, a été retrouvé sous la peinture blanche qui le recouvrait et complètement dégagé (ill. 3). Le reste du décor datant de la reconstruction/restauration après l’incendie de la Commune (les murs étaient encore debout) avaient été également repeint en blanc. Il va être reconstitué sans aucun problème puisqu’il s’agit de motifs géométriques simples (ill. 4) documentés par des photos et dont la couleur est attestée par des traces qui ont été retrouvées.


3. Salle du Conseil de l’Ordre (en cours de restauration)
Plafond orné d’un ciel, redécouvert
Paris, Palais de la Légion d’Honneur
Photo : Didier Rykner
Voir l´image dans sa page
4. Salle du Conseil de l’Ordre (en cours de restauration)
Test de restauration des murs
Paris, Palais de la Légion d’Honneur
Photo : Didier Rykner
Voir l´image dans sa page

Les façades ont également été nettoyées et c’est dans le cadre de ces travaux que la Chancellerie, voulant remettre le jardin en état, et souhaitant se protéger des intrusions mais aussi du bruit de la rue, a décidé d’installer un treillis en bois vert sur la rue de Solférino, et cette barrière en verre sur le quai. Une mauvaise décision qu’une concertation avec des spécialistes de l’architecture et les associations aurait permis de faire évoluer vers une solution différente.
Mais lorsqu’une telle intervention est prévue devant un monument classé (et en secteur sauvegardé), c’est l’ABF qui est en charge de donner, ou non, l’autorisation.
Nous avons vu le premier projet, retoqué (ill. 5), et le second, accepté (ill. 6). Nous avons lu la décision de refus et celle d’acceptation. Non seulement aucune explication n’est donnée ni pour le refus ni pour l’autorisation, mais, surtout, les deux projets sont très similaires. La barrière de verre, sur le premier, était encore plus largement recouverte de motifs, le treillis revenait en angle droit sur le quai et était un peu plus haut. Mais le principal problème n’est pas le treillis dont une petite partie est déjà construite et qui n’occulte pas la vue sur l’édifice (déjà en partie caché par les arbres sur la rue de Solférino). Le principal problème, pas de loin car il n’est pas trop visible, mais de près, est bien cette barrière vitrée dont nous avons donné déjà des photographies. Elle est indigne de ce monument.


5. Clôture du Palais de la Légion d’Honneur
projet repoussé par l’ABF
© Geoffroy Corpelet
Voir l´image dans sa page
6. Clôture du Palais de la Légion d’Honneur
projet accepté par l’ABF
© Geoffroy Corpelet
Voir l´image dans sa page

Interdire cet ajout qui dénature la façade est une responsabilité de l’ABF. Comment a-t-il pu accepter cela ? Pourquoi, surtout, l’interdire d’abord pour autoriser ensuite une version à peine amendée ? Nous avouons avoir du mal à le comprendre, mais Serge Brentrup n’ayant jamais répondu à notre mail du 1er octobre (doublé d’un appel téléphonique) nous ignorerons les tenants et les aboutissants de cette affaire qui démontre donc, une fois de plus, un grave dysfonctionnement des services de l’État.
Serait-ce trop espérer que la bonne foi de la Chancellerie de la Légion d’Honneur puisse aboutir un jour à une remise en cause de cet aménagement ? L’erreur est humaine, mais persévérer...

Vos commentaires

Afin de pouvoir débattre des article et lire les contributions des autres abonnés, vous devez vous abonner à La Tribune de l’Art. Les avantages et les conditions de cet abonnement, qui vous permettra par ailleurs de soutenir La Tribune de l’Art, sont décrits sur la page d’abonnement.

Si vous êtes déjà abonné, connectez-vous.