Mais où est passé le directeur général des Patrimoines ?

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Anne-Louis Girodet-Trioson (1767-1824)
Les Adieux de Coriolan à sa famille, 1786
Huile sur toile - 114 x 146,1 cm
Washington, National Gallery
Photo : Christie’s
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Le ministère de la Culture est une administration, qui fonctionne sur fonds publics et qui a pour rôle, entre autres, de réguler l’exportation des biens culturels. Cette administration, comme toutes les autres, doit rendre des comptes aux citoyens. Lorsque nous l’interrogeons, en tant que journal bénéficiant d’un numéro de Commission paritaire, reconnu d’Information Politique et Générale au sens de l’article 39 bis du code des Impôts, et employant trois journalistes, nous ne faisons que notre métier, qui est d’informer.

Or, et c’est cela la règle depuis fort longtemps, mais d’une manière encore bien plus évidente depuis l’arrivée de Philippe Barbat à la tête de la direction des patrimoines, la meilleure façon de traiter la presse est de refuser de lui répondre. Un exemple édifiant est celui que nous donnons ci-dessous. Il s’agit de nous inquiéter de l’exportation d’un tableau d’Anne-Louis Girodet, vendu à la National Gallery de Washington lors d’une vente aux enchères Christie’s New York le 29 octobre 2019 (voir la brève du 1/11/19). Nous nous contenterons donc ci-dessous de reprendre l’(absence d’) échange de mails avec le ministère de la Culture.

Le 15 octobre 2019, j’envoie ce mail au service de presse du ministère de la Culture, à Ludovic Guillot, conseiller du ministre en charge de la Communication, avec copie à Sébastien Allard, chef du grand département des peintures, et Anne-Solène Rolland, chef du Service des Musées de France

« Je souhaiterais savoir si le tableau en vente chez Christie’s New York, la participation de Girodet au concours du Prix de Rome en 1786, Les Adieux de Coriolan à sa famille, a obtenu son certificat d’exportation. Son historique indique en effet « Private collection, France, since at least the early 20th century, until recently » ce qui implique qu’il doit avoir son certificat.
Si le certificat a été accordé, je souhaite savoir pourquoi.
[…] Je vous remercie par avance de votre réponse rapide. J’écrirai un article à ce sujet au plus tard demain soir. »

Réponse du ministère : aucune.

Le 20 novembre 2019, je renvoie ce mail au service de presse du ministère de la Culture avec une précision, et une nouvelle question :

« J’avais envoyé ce mail le 15 octobre. En réalité, le tableau étant estimé 100-140 000 euros, le certificat n’avait manifestement pas été demandé.
Oui, mais il s’est vendu bien au delà de 150 000 euros : 2 655 000 dollars avec les frais. Donc un certificat aurait dû être demandé, car l’estimation était manifestement très sous-évaluée. Que compte faire le ministère pour s’opposer à ce qui revient à contourner la loi, d’autant que cela risque de donner des idées à certains.
Je vous remercie par avance de votre réponse.
 »

Je remercie toujours par avance des réponses qui ne viennent jamais !

Le 3 décembre 2019, j’envoie un nouveau mail au service de presse du ministère de la Culture, accompagné du mot suivant qui témoigne d’un peu d’énervement, assez compréhensible.

« Une fois de plus, il est insensé que je ne puisse pas avoir de réponse à cette question.
C’est réellement insupportable, cette politique de l’absence complète de réponse ou d’accusé réception.
 »

Le 4 décembre 2019 nous recevons enfin une réponse du service de presse du ministère de la Culture, manifestement un peu gêné :

« Nous avons bien reçu votre demande que nous avons transmise aux services concernés.
Pouvez-vous nous préciser quel est le délai de bouclage de votre article ?
 »

Je réponds dans la foulée :

« Merci de votre réponse. Compte-tenu de la date de la vente, et de la date à laquelle je vous ai envoyé la question, le délai de bouclage est "le plus rapidement possible" »

Hier, le 12 décembre 2019, je n’avais toujours pas reçu de réponse. Voici le mail que j’ai adressé directement au directeur des Patrimoines, Philippe Barbat, avec copie à Ludovic Guillot et au service de presse.

« J’ai envoyé une question sur ce tableau de Girodet à vos services en octobre dernier, avant la vente. Sans réponse.
Le 20 novembre, je renvoie ce mail, pour compléter la question, qui me semble légitime. Sans réponse.
Je relance le 3 décembre, et je reçois - enfin - un accusé de réception me demandant ma dead line. Je réponds : le plus rapidement possible.
Nous sommes aujourd’hui le 12 décembre. Aucune réponse.
J’avais déjà l’habitude de ces pratiques du ministère, l’absence totale de réponse, et plus précisément de la direction des Patrimoines. Cela prend sous votre direction des proportions absolument inadmissibles.
Je réitère donc mes questions, et je le ferai chaque jour jusqu’à ce que j’aie une réponse.
 »

Bien entendu, nous n’avons toujours pas eu de réponse aujourd’hui. Et finalement, plutôt que de renvoyer la même question tous les jours, nous jugeons préférable de la publier. Les paris sont ouverts : aurons-nous une réponse ? Nous misons sur la négative. Voilà ce qu’est, aujourd’hui, la direction des Patrimoines. Mais il faut les comprendre : une direction sans tête ne peut pas communiquer.

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