Louvre : un centre de conservation garanti 100% sans conservateur

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Pôle de conservation du musée du Louvre à Liévin.
Vue d’ensemble du projet
© Rogers Stirk Harbour + Partners / Mutabilis
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Alors que la rumeur enfle - propagée notamment par le principal intéressé - de la reconduction de Jean-Luc Martinez à son poste de président-directeur du Musée du Louvre, nous avons eu connaissance d’une interview très courte donnée par Brice Mathieu, directeur délégué du Centre de conservation du Louvre à Liévin, et paru dans le journal en ligne News Tank Culture le 8 décembre dernier. Celle-ci confirme ce que nous expliquions dans notre article sur le bilan de Jean-Luc Martinez au Louvre et aggrave encore le constat, si cela était possible.

Non seulement l’équipe du centre de conservation ne dépendra pas des directeurs de département du Louvre, ce qui fera ainsi perdre le contrôle des départements sur leurs collections en réserve, mais aucun conservateur ne sera recruté dans cette équipe du centre de « conservation » ! Voici ce que dit le dénommé Brice Mathieu dont la seule formation est un Master 2 en Histoire Contemporaine (mention bien) et qui n’a occupé que des postes administratifs et financiers avant de se voir propulsé « Adjoint à la direction de la Recherche et des Collections » qu’il avait contribué à créer, et d’être nommé à son poste actuel en février 2016 [1] : « Aucun de nous ne sera conservateur du patrimoine pour garantir une certaine forme de neutralité et éviter tout risque de concurrence entre les sept départements du musée, par exemple dans les décisions à prendre sur les études de collection ou les prêts d’œuvres ». Il explique donc, froidement et sous le contrôle évident de Jean-Luc Martinez, qu’il ne faut pas un conservateur pour diriger un centre de conservation et que les décisions concernant les études ou les prêts d’œuvres ne seraient pas prises par les départements. Il justifie cela en prétextant l’organisation actuelle du Louvre : « Cette volonté se retrouve dans l’organigramme du musée du Louvre. La direction déléguée du Centre de conservation est rattachée à la direction de la recherche et des collections du musée du Louvre, créée en 2014, seule habilitée à prendre ce type de décision. »

Cette direction de la recherche et des collections du musée, créée par Jean-Luc Martinez après son arrivée à la tête du Louvre, et qui n’est responsable en réalité d’aucune collection ne prend pour l’instant pas - encore - ce type de décision qui devrait, c’est une évidence, rester l’apanage des départements. Mais les masques tombent et ce que nous écrivions - sans pourtant connaître cette interview - est ici complètement confirmé : la volonté de Jean-Luc Martinez est bien de tuer les départements en leur enlevant leurs trois principales fonctions : conserver les œuvres du musée, mener leur étude, et décider de leurs prêts. Plus grave encore, il envisage désormais de ne plus confier cela à des conservateurs « pour garantir une certaine forme de neutralité ». Un musée sans réserves, une direction des collections sans collections, un centre de conservation sans conservateurs, voilà le Louvre rêvé par son président-directeur. Ceux qui s’inquiétaient de notre constat (qu’ils ne contestent pas) sur les dérives actuelles du Louvre, craignant que la mise en cause de Jean-Luc Martinez risquait de mener définitivement au remplacement des conservateurs par des directeurs administratifs ou des énarques, devront bien finir par admettre la triste réalité. Celui qui ouvre grand la voie à cette pratique, c’est Jean-Luc Martinez lui même.

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