La Mairie de Paris veut « réinventer Paris »

3/11/14 - Patrimoine - Paris - Infatigable Anne Hidalgo qui donne le coup d’envoi d’une nouvelle opération modestement intitulée « Réinventer Paris », consistant à lancer des « appels à projets » pour 23 sites. Tous appartiennent à la Ville de Paris et tous seront vendus par celle-ci à des promoteurs chargés de mener à bien les dits projets.
La plupart d’entre eux concernent des friches urbaines dans les arrondissements périphériques. Tout aménagement les concernant ne peut a priori que les améliorer, sans trop craindre une catastrophe urbaine et architecturale (sauf si les architectes proposent des tours, ce qui ne semble pas prévu). Ce ne serait donc pas inquiétant si les promoteurs de cette opération n’étaient pas la maire de Paris et son adjoint à l’urbanisme Jean-Louis Missika. Attendons de voir.


1. Hôtel de Coulanges
35/37, rue des Francs-Bourgeois
Photo : Didier Rykner
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2. Escalier de l’hôtel de Coulanges
Photo : Didier Rykner
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3. Amphithéâtre de l’ancienne faculté de médecine
Photo : Dossier de presse
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Nettement plus alarmant cependant : cela concerne aussi des monuments historiques situés au cœur du Paris. L’un est l’hôtel de Coulanges, des XVIIe et XVIIIe siècles, qui abrite aujourd’hui, en plein Marais, des services de la Direction des affaires culturelles de la Ville et la Maison de l’Europe. Si tous les décors intérieurs (à l’exception du bel escalier de l’aile droite) ont disparu, il s’agit néanmoins d’un bel immeuble dans lequel on ne peut pas faire n’importe quoi d’innovant. On peut s’interroger sur la manière dont le dossier de presse « vend » cet édifice qui « offre un potentiel exceptionnel au cœur d’un quartier mêlant histoire et dynamisme ». On croirait une prose de promoteur !
Un autre bâtiment, situé au 15, rue de la Bûcherie, est qualifié d’« hôtel particulier » ce qu’il n’a jamais été : il s’agit de l’ancienne faculté de médecine édifiée à l’origine au XVe siècle, largement remaniée au XVIIIe, et sur laquelle a été édifié en 1742, par l’architecte Barbier de Blignères, un amphithéâtre où se pratiquaient les dissections [1]. Jean-Louis Missika a eu beau déclarer lors de la conférence de presse que « la conservation du patrimoine sera une des priorités des projets », cela ne nous rassure pas pour autant quand on voit un appel à projet « innovant » lancé sur un tel bâtiment. Rappelons aussi que sur la place de la République ou sur les Serres d’Auteuil, le patrimoine est, selon les mêmes, respecté et mis en valeur…
On peut, également, se demander ce que deviendra un bel hôtel particulier de 1880 situé 29 avenue de Villiers et qui abritait un conservatoire municipal. Selon le dossier de presse : « Depuis son origine, le bâtiment a subi très peu de modifications et les décors intérieurs ont été préservés pour l’essentiel. » Seul problème : il n’est pas protégé au titre des monuments historiques et la programmation est « libre », ce qui signifie que les candidats peuvent y proposer ce qu’ils veulent. On peut donc tout craindre.


4. Hôtel particulier, vers 1880
29, avenue de Villiers
Photo : Dossier de presse
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5. Sous-station électrique Voltaire
14, avenue Parmentier
Photo : Dossier de presse
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Ces beaux monuments ne sont pas les seuls concernés. On trouve aussi, dans la liste, des éléments de ce qu’on pourrait appeler le « petit patrimoine », qui date souvent de la fin du XIXe ou du début du XXe, plus simples mais contribuant aussi à donner son charme à la capitale. C’est le cas des bains-douche Castagnary, qui forment un coin de rue au 34 rue de Castagnary dans le XVe arrondissement, de la gare Masséna dans le XIIIe arrondissement ou encore de la sous-station électrique Voltaire, belle architecture de métal dont il existe un certain nombre d’exemples à Paris.

Tant qu’il ne s’agit que d’appels à projet, il n’y a pas lieu de crier au scandale (même si l’on peut regretter que la Ville cède ainsi de beaux éléments de son parc immobilier). Inutile de dire que nous resterons extrêmement vigilant sur les propositions faites pour les lieux patrimoniaux

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