La chapelle retrouvée du Sénat

1. Cour d’honneur du Palais du Luxembourg
La chapelle est au rez-de-chaussée de cette aile
(les quatre fenêtres du bas)
Photo : Didier Rykner
Voir l´image dans sa page

L’un des premiers articles publiés sur La Tribune de l’Art en avril 2003 s’intitulait La chapelle cachée du Sénat. Nous y regrettions la manière dont le Sénat avait occulté, depuis le début des années 1980, une superbe chapelle datant de la Monarchie de Juillet, non seulement en en cloisonnant complètement l’intérieur pour en faire des bureaux (ceux de la chaîne Public-Sénat), mais aussi en oubliant purement et simplement son existence en omettant de la citer dans des ouvrages récemment parus sur l’histoire du Palais du Luxembourg.

Il est donc très heureux que la haute assemblée ait décidé, à l’occasion du départ de la chaîne parlementaire vers d’autres lieux, de décloisonner cette chapelle et de lui rendre, enfin, sa beauté originelle. Nous avons appris cette nouvelle grâce à une lectrice qui nous a signalé un appel à marché public pour l’aménagement dans cet espace d’une salle de réunion multimédia.
Le Sénat nous a très aimablement répondu et permis de visiter cette ancienne chapelle, qui se trouve au rez-de-chaussée de l’aile est de la cour d’honneur (à gauche en entrant ; ill. 1), tout en nous rassurant sur son devenir. Il n’était évidemment pas question de rendre celle-ci à sa fonction première, sachant qu’elle l’avait perdu - avec son mobilier - dès le début du XXe siècle. Mais le souhait des questeurs de l’inclure dans le circuit des journées du patrimoine dès l’année 2017 montre qu’il n’est plus question de la cacher.


2. L’ancienne chapelle après
enlèvement des cloisons ;
au fond, peinture murale
d’Abel de Pujol ; au plafond,
de Vauchelet
Photo : Didier Rykner
Voir l´image dans sa page
3. Alexandre-Denis Abel de Pujol (1787-1861)
Dieu et les Vieillards de l’Apocalypse, partie haute
Peinture murale
Paris, ancienne chapelle du Sénat
Photo : Didier Rykner
Voir l´image dans sa page

Les peintures murales (ill. 2), splendides (voir ci-dessous notre vidéo), dues à Abel de Pujol pour le mur d’entrée (ill. 3) et à Théophile Vauchelet pour le plafond et l’abside (celle-ci est plate, si bien qu’en l’absence de tout mobilier religieux il est difficile de comprendre l’orientation d’origine), vont être restaurées. Si l’œuvre d’Abel de Pujol, qui représente Dieu et les Vieillards de l’Apocalypse, est en assez bon état, tout comme l’est le plafond où se trouvent les évangélistes et les anges portant les instruments de la Passion par Théophile Vauchelet, Le Concert des Anges de ce dernier (ill. 4) a été malheureusement en grande partie repeint, surtout sa partie centrale où se trouvait l’orgue (disparu).
Le Sénat travaille, pour remettre ces peintures en état, avec le C2RMF. On ne sait pas encore si une partie de la peinture originale se trouve encore sous les repeints.


4. Théophile Vauchelet (1802-1873)
Le Concert des Anges
Peinture murale (en partie repeinte)
Paris, ancienne chapelle du Sénat
Photo : Didier Rykner
Voir l´image dans sa page

Si Abel de Pujol est désormais mieux connu, notamment grâce aux Musée des Beaux-Arts de Valenciennes (voir l’article sur la récente exposition), Théophile Vauchelet, qui fut son élève et celui de Louis Hersent, l’est beaucoup moins. Il fut prix de Rome en 1829 (en même temps que Jean-Louis Bezard) et bénéficia ensuite de nombreuses commandes. La qualité de ces peintures murales devrait inciter un étudiant à se pencher sur cet artiste. Signalons que des dessins préparatoires pour les quatre évangélistes sont conservés au Musée des Beaux-Arts de Nantes.


5. Théophile Vauchelet (1802-1873)
Saint Luc
Peinture murale
Paris, ancienne chapelle du Sénat
Photo : Didier Rykner
Voir l´image dans sa page
6. Théophile Vauchelet (1802-1873)
Saint Luc
Crayon et fusain - 53,5 x 64,5 cm
Nantes, Musée des Beaux-Arts
Photo : T. Richard/MBA de Nantes
Voir l´image dans sa page

La première étape des travaux prévus pour la chapelle a donc consisté à lancer l’étude de faisabilité qui définira les conditions dans lesquelles sera réalisée la salle de réunion multimédia. Il n’y a pas de raison, a priori, que cela ne puisse pas se faire sans toucher au décor et le Sénat nous a assuré que celui-ci serait respecté. La seule question encore non résolue est le devenir de quatre peintures de Jean Gigoux, roulées depuis 1982. Celles-ci ont été examinées et photographiées (voir la vidéo), trois d’entre elles sont en plutôt bon état, une quatrième devra subir une restauration plus poussée. Elles ornaient quatre emplacements à l’est du bâtiment, aujourd’hui percés de fenêtres.
Pour l’instant, le Sénat ne sait pas encore si elles seront remises en place car il craint des problèmes d’éclairage de la salle. Dans le cas contraire, soit elles retourneraient en réserves, soit elles seraient installées ailleurs dans le Palais du Luxembourg, soit encore elles seraient déposées dans un autre endroit.



La chapelle du Sénat retrouvée par latribunedelart


Nous souhaitons, pour notre part, que la chapelle retrouve autant que possible un état proche de ce qu’en avait fait Alphonse de Gisors, l’architecte qui l’a aménagé à partir de 1836, ce qui suppose la réinstallation des tableaux de Jean Gigoux [1]. L’éclairage de la salle est largement assuré par les quatre baies de l’ouest et peut être complété par les lustres (d’origine) et l’installation judicieuse de lampes complémentaires. Il serait dommage que les excellentes intentions du Sénat n’aille pas jusqu’au bout. On doit en tout cas saluer la transparence avec laquelle il communique sur cette affaire et le remercier pour nous avoir autorisé à suivre son avancement. Nous reviendrons donc sur la renaissance de cette belle chapelle.

Vos commentaires

Afin de pouvoir débattre des article et lire les contributions des autres abonnés, vous devez vous abonner à La Tribune de l’Art. Les avantages et les conditions de cet abonnement, qui vous permettra par ailleurs de soutenir La Tribune de l’Art, sont décrits sur la page d’abonnement.

Si vous êtes déjà abonné, connectez-vous.